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Pierre Campion : Mallarmé ou la décision

Article publié dans la revue Poétique, n° 145, février 2006.

Mis en ligne le 3 février 2007.

© Pierre Campion.


LA DÉCISION

Une notion à l'épreuve d'un texte de Mallarmé

Je voudrais ici proposer et préciser une notion d'étude en matière de poétique, la notion de la décision, en la mettant à l'épreuve de l'un des grands sonnets du dernier Mallarmé. Il s'agit du Tombeau écrit en 1896 en l'honneur de Verlaine et publié dans La Revue Blanche début 1897 à l'occasion du premier anniversaire de sa mort[1].

 

Tombeau

Anniversaire — Janvier 1897

 

Le noir roc courroucé que la bise le roule

Ne s'arrêtera ni sous de pieuses mains

Tâtant sa ressemblance avec les maux humains

Comme pour en bénir quelque funeste moule.

 

Ici presque toujours si le ramier roucoule

Cet immatériel deuil opprime de maints

Nubiles plis l'astre mûri des lendemains

Dont un scintillement argentera la foule.

 

Qui cherche, parcourant le solitaire bond

Tantôt extérieur de notre vagabond —

Verlaine ? Il est caché parmi l'herbe, Verlaine

 

À ne surprendre que naïvement d'accord

La lèvre sans y boire ou tarir son haleine

Un peu profond ruisseau calomnié la mort.

La notion de décision

J'entends la décision d'abord dans son sens le plus immédiat et le plus simple : écrivant ce poème, Mallarmé prend en tel point de son texte (et à tel moment ?) telle décision : choisir tel mot plutôt que tel autre, tel tour de la syntaxe au lieu de tel autre, telle rime et telle césure, tel titre, etc.

On voit tout de suite la difficulté. Hors le fait des quelques variantes présentées par les trois manuscrits que nous avons de ce poème antérieurement au texte publié dans La Revue Blanche du 1er janvier 1897, objectivement nous ne savons rien des péripéties qui affectèrent la rédaction de ce poème[2].

Je serai donc amené, par le fait de ce manque presque total d'informations mais aussi par principe, à supposer certains de ces événements, quitte à justifier ces suppositions par plusieurs sortes de raisons tenant les unes à la prosodie et à la métrique, à la syntaxe, etc. et les autres, évidemment conjointes aux premières, aux déterminations dynamiques des significations ainsi développées, à leurs intentions présumables, aux contraintes enfin d'un certain projet poétique. La notion de décision revêtira donc elle-même un caractère heuristique, dont la justification finalement résiderait dans les acquis éventuels que cette recherche permettrait de se procurer concernant le sens de ce poème. Autrement dit, la question du sens, qui se pose toujours de manière centrale et parfois provocante chez Mallarmé, recevrait ici une réponse de l'ordre de la stratégie[3].

Des décisions attestées

Dans son édition, Bertrand Marchal compte trois manuscrits antérieurs à la publication en revue, qu'il range dans cet ordre chronologique : celui de la collection Clayeux puis ceux de la bibliothèque Doucet : MNR Ms. 1202, et MNR Ms. 1201[4]. Apparemment, le troisième a servi à la publication en revue.

Prenons d'abord, au vers 7, le remplacement, mot pour mot et strictement deux syllabes pour deux syllabes, de « levé » par « mûri » (remplacement effectué dans le troisième manuscrit). Ainsi, dans le dernier état que nous ayons du poème avant publication, cette décision consiste-t-elle, peut-être au dernier moment, à substituer à la suggestion de l'astre comme apparition (le poète métamorphosé au ciel par une sorte d'apothéose) celle de cet astre comme prégnant, et comme poursuivant dans et par la dynamique des lendemains sa maturation d'abord considérée in utero : un corps céleste assez étrange, venu au monde dans et par le chant d'un oiseau. Il s'ensuit un quadruple changement de sens : les lendemains ne sont plus seulement le moment du lever d'un astre mais aussi l'opérateur de son développement ; l'image nuptiale en est complétée et densifiée, et le temps grammatical du vers 8 (« argentera ») en est constitué plus rigoureusement encore comme futur antérieur, car il trace désormais le trajet d'une logique plus organique que celle du lever de cet astre, celle d'un mouvement, lui, sans solution de continuité, inauguré bien avant la mort du poète et porteur d'avenir ; enfin le phénomène perd sa couleur mythologique au bénéfice d'une signification plus naturelle. Cependant quelque chose de péjoratif demeure et même se confirme dans cette évocation nouvelle, quelque chose que le vers 6 disait déjà mais que gênait sans doute le mot « levé » : si immatériel que soit ce chant annonciateur d'une naissance ultérieure à l'immortalité, ce roucoulement virgilien (turtur ab ulmo)[5] empêche pourtant de ses voiles nuptiaux une juste compréhension de la mort du poète, précisément par la suggestion d'une naissance attendue au-delà et par le ministère de la mort. À la fois développant l'image, en une jeune épousée, du fruit glorieux de ses entrailles et pourtant participant à en dénoncer la perspective religieuse, la transformation d'une assomption en une annonciation conforte le mouvement ambigu du poème qui s'en va, non sans le risque d'une fascination et d'un malentendu, à la critique d'une certaine idée, religieuse, de la mort du poète et d'une gloire post et per mortem. Comme si le vrai mouvement que Verlaine dessine en sa mort avait encore été non exactement compris de Mallarmé lui-même jusqu'au moment de livrer son poème à l'imprimeur, ou bien comme si le mouvement stratégique de la critique mallarméenne à l'égard de la mort du poète en tant que lever d'un astre nouveau dans le ciel et/ou nouvelle naissance n'était pas encore totalement maîtrisé, ou encore comme si le retour d'une idée rejetée ne menaçait pas toujours de ses ruses, — ou encore comme si ce développement de la critique se heurtait constamment à ce doute (fécond) qui habite tout stratège, à savoir le sentiment d'un manque de sa maîtrise, qui se manifeste à lui in medias res tantôt sur un point de l'action, tantôt sur un autre. Non certes Verlaine ne s'élèvera pas en corps glorieux au-dessus de son tombeau en un matin de Pâques, oui sa maturité éclate déjà en ce tombeau lui-même et dès avant l'ensevelissement, non pas exactement comme une promesse d'immortalité mais comme la continuation ici bas d'un développement, que le chant par trop fascinant d'un oiseau haut situé ne saurait malgré tout nous dissimuler.

Dans Mallarmé, un poème est une situation composée de forces ambivalentes et sans cesse modifiées que le poète doit s'efforcer de maîtriser, autant qu'il est possible et jamais de manière assurée. Ainsi l'image fondamentale de la pierre du sépulcre roulée sur le côté — comme plus loin l'image virgilienne, à sa manière et suivant d'autres connotations — emporte-t-elle avec elle, à la fois et dangereusement, l'affirmation positive et déterminée, la certitude même d'une survie du poète (une forme nécessaire de la foi) mais aussi la marque, d'origine évangélique et par là suspecte, d'une résurrection (une forme de l'illusion qu'il y a dans toute foi). Rectifier constamment le tir : toute pensée stratégique en est là, car elle est incertaine des conséquences de ses propres références et inventions, avertie des effets pervers de ses initiatives et inquiète des forces mêmes qu'elle met en jeu, si bien que l'effort de ses corrections — ou de ses réglages successifs — ne vise pas à une perfection de cohérence (disons à une totalisation du texte) mais à la sécurité et à l'efficacité d'une opération de poétique toujours douteuse : « Un coup de dés jamais […] n'abolira le hasard. »

À cet égard, examinons encore, au vers 1, la substitution du mot « courroucé » au mot « angoissé » (correction portée sur le ms. Clayeux). Sans que la construction syntaxique attachée par la suite au participe passé en soit altérée, la disposition et l'intention de la pierre tombale en sont modifiées et ses pouvoirs d'intimidation et d'obstruction en sortent évidemment renforcés. Quant au vers 2, il nous reste les traces de deux arbitrages : la correction, encore sur le ms. Clayeux et maintenue par la suite, de « s'aplanira » en « s'apaisera » et la substitution, avec le troisième manuscrit, de « ni » à « pas ». Si la première relève sans doute seulement d'une plus juste appropriation à l'intention agressive de la pierre et à la physique de son déplacement, la seconde produit un audacieux changement de pied dans la prosodie et dans la syntaxe, cela au prix d'une sorte de lectio difficilior. En effet, l'accent de l'hémistiche porte désormais sur le ni, obligeant par là le lecteur à porter une attention d'autant plus grande aux incidences syntaxiques de ce changement de l'adverbe de négation en conjonction de coordination, c'est-à-dire à chercher le second « ni », puis à constater son absence et donc à revenir en pensée sur ce problème d'un seul « ni » : des entraînements et des résistances se produisent dans la marche du lecteur, des conjectures se forment et se détruisent ou se confirment, il se déroule une sorte de drame aux minuscules péripéties. Ainsi, à moins que l'on ne suppose pour ce « ni » le sens étymologique du latin nisi (si ce n'est, à moins que), on devra construire mentalement, avant le membre de phrase réel, le tour explétif d'un premier membre comme *« ni sous l'empire de quelque résistance imaginable ». Mieux, si l'on gardait superposées et se surdéterminant l'une l'autre ces deux interprétations syntaxiques, on aurait alors la concourance, en concurrence, de deux significations[6] :

1 – Dans son mouvement, la dalle funéraire ne cessera pas de peser sur le défunt, si ce n'est sous le geste bénisseur des « pieuses mains ».

2 – Dans ce mouvement, elle ne s'arrêtera pas de rouler, même sous ce geste trop humain qui tend à l'arrêter sous ses fleurs mortuaires[7].

S'il en était ainsi, à travers cette décision d'une économie remarquable et par une ambiguïté analogue à celle que nous avons déjà relevée plus haut, on retrouverait la coexistence dangereuse des deux significations attachées à la survie du poète : d'une part, la mort est vaincue ; d'autre part, la pesanteur des choses et, plus subtilement, de certains effets nocifs d'ordre religieux persiste à compromettre et à pervertir en résurrection l'idée de l'immortalité poétique. Où l'on voit qu'il ne suffit pas d'éliminer d'un coup heureux tous les facteurs de la pesanteur (« [ni sous…] ni sous… ») pour échapper sûrement aux séductions mortelles de la grâce.

Ainsi on présume, à la limite, que toute décision laisse une trace objective dans le texte et, réciproquement, que tout fait objectif du texte résulte d'une décision soit très générale (écrire tel sonnet, pour Verlaine ou pour Baudelaire…) soit particulière (substituer tel terme à tel terme…).

Des décisions dans un combat

J'appelle donc maintenant décision tout acte de poétique, attesté ou non par un document ou une source extérieurs (manuscrit, correspondance…), acte produit dans la conduite d'un projet risqué, — et je vais en rechercher certaines, que l'on pourrait construire par l'examen des effets produits à l'égard de ce projet lui-même et des infléchissements qu'elles lui impriment.

Au vers 12, on trouverait beaucoup d'événements, c'est-à-dire de ces décisions, dont certaines extérieurement attestées et l'une que je suppose. Cette dernière a dû consister dans le choix de faire porter l'accent de l'hémistiche sur le « que ». (Ce type de césure, sur un monosyllabe pur outil grammatical est loin d'être rare dans Mallarmé, et l'on vient d'en voir un au vers 2.) Quels sont ici les effets de cette décision, laquelle aurait été prise dès avant la copie établie dans le ms. Clayeux et peut-être originellement, dès la première formulation de ce vers ? Dans la marche du poème que nous avons déjà esquissée, cette configuration rappelle et confirme l'intention stratégique de minimiser la mort. En ce jardin de la résurrection, les saintes femmes venues embaumer le corps de Jésus trouvent le tombeau vide[8]. Mais le facétieux Verlaine se dérobera à leur recherche (vers 11 : une voix, pour ainsi dire citée, avec son ton propre d'appel : « Verlaine ? » et la réponse, ironique : « Il est caché parmi l'herbe, Verlaine  »), tout occupé qu'il est, dissimulé dans l'herbe, et non pas « surpris » (autre décision supposable, vu le caractère paradoxal de ce qu'il découvre : le remplacement d'une séquence *« À se laisser surprendre », avec voyelle à suivre), mais à « surprendre » certain secret bien caché à tous et non pas vraiment à lui, et à le révéler comme la seule bonne nouvelle qui vaille : la mort n'est ni un Styx infranchissable ni un Léthé à boire, ni la tombe chrétienne où attendre la résurrection, mais seulement cela qui va être dit plus bas, « un peu profond ruisseau », que l'on saute d'un bond sans perdre le souffle vital. Cependant, si la cellule « À ne surprendre que », une fois (et en une fois ?) posée, probablement n'a plus varié (elle est très solide), le deuxième hémistiche de ce vers 12 atteste, lui, plusieurs remaniements :

À ne surprendre que dans le complice accord (ms. Clayeux)

À ne surprendre que dans le vacant accord (ms. Clayeux, corr.)

À ne surprendre que dans le vacant accord (ms. Doucet 1, qui confirme donc cette correction)

Ainsi le vers « À ne surprendre que naïvement d'accord » n'apparaît-il dans sa version définitive que dans le troisième manuscrit. On va donc d'un accord formé dans le jeu entre Verlaine et le secret, accord de complicité qui marque encore une intention de la part de la mort, à un type d'accord marqué par le repos et la liberté (des deux parties) puis enfin au seul mouvement de Verlaine à l'égard de la mort, mouvement d'acquiescement à cette forme-là de la mort, mouvement qui se confond avec l'appropriation de ce secret, laquelle s'effectue en vertu d'une croyance naïve, parce que native, en vertu de l'étymologie de ce mot : la nature de la poésie de Verlaine, dès son vivant et de toujours, et maintenant au présent de ce poème, fait que le poète ne s'étonne en rien de ce qu'il découvre par lui-même et non par quelque révélation ou complaisance ou grâce, puisqu'il le savait déjà. La naïveté est le caractère de la simple et heureuse et constante adéquation de soi à soi dans l'être de ce poète, de cet être à sa poésie et de sa poésie à la pure et simple mort.

C'est ce secret de Verlaine que Mallarmé surprend à son tour, mais lui selon une marche calculée et au terme d'un combat conscient et appris à l'épreuve d'une vie en poésie : « tenir le pas gagné », comme écrivait l'autre. Car c'est un secret bien défendu, non par Verlaine mais par des puissances intéressées à nous le dérober. L'ennemi, ce n'est pas la mort mais certaines mythologies de la Mort, et spécialement la religion chrétienne, attachées à la confisquer chacune au profit de son au-delà : « vieux plumage » et toujours renaissant, d'autant plus qu'il se replie en nous (en lui, Mallarmé), invétéré :

Quand l'ombre menaça de la fatale loi

Tel vieux Rêve, désir et mal de mes vertèbres,

Affligé de périr sous les plafonds funèbres

Il a ployé son aile indubitable en moi[9].

La vérité de la mort, c'est qu'elle n'est qu'« un peu profond ruisseau ». Parmi les dernières décisions, celle-ci, au vers 14 : dans le dernier manuscrit, changer en minuscule la majuscule du nom de la Mort, qu'il avait conservée jusque là dans toutes les versions, et lui arracher par là les prestiges indus que les religions lui avaient attachés. Mais déjà, au même vers et peut-être dès les premières esquisses du poème, une autre décision avait répondu aux retours de flamme de l'idée mortelle : informant solidement une participiale dans l'unité rythmique du deuxième hémistiche[10], l'expression parfaitement grammaticale et parfaitement métrique de « calomnié la mort » avait déroulé, en continuation avec le premier hémistiche (« Un peu profond ruisseau »), la vérité complète de la mort, c'est-à-dire à la fois ce qu'elle est et la cause pour laquelle cette vérité ne peut être reconnue que par le génie de l'enfance en Verlaine et le génie de la bataille en Mallarmé : ce qui fait que la Mort n'est que la mort, cela ne peut être saisi que par la dénonciation de ce que nous en croyons, pour avoir nous-mêmes trop bien intériorisé une certaine calomnie.

Ce poème de Mallarmé est un poème de la philosophie critique, dans lequel la vérification métaphysique constitue une action polémique au terme de laquelle la vérité de l'alexandrin est, elle aussi et jusqu'à nouvel ordre, reconquise et réaffirmée contre toutes les lectures qui, faisant de ce vers-ci une séquence de 10/2 syllabes, redonneraient (et redonnent) au dernier moment tous ses prestiges calomnieux à la mort, au terme d'un poème qui les dénie fermement et pas à pas. Non, il ne faut pas lire « Un peu profond ruisseau calomnié// la Mort », car une décision de Mallarmé, consistant à contrarier (ou plutôt à surdéterminer) une syntaxe attendue et trop humaine par la prosodie normale du 6/6 syllabes et par une autre syntaxe tout aussi légale, cette décision nous impose à nous lecteurs — contre notre doxa de la syntaxe poétique, et de la Mort — la décision à notre tour de reconnaître et d'observer celle du poète.

La vérité — ici, de la mort — n'est pas une entité idéale que l'on n'aurait qu'à contempler, ni même une formule acquise au terme d'une démonstration congrûment conduite, mais la reprise toujours menacée d'un bien qui nous a été confisqué, reprise vers par vers et mot par mot sur toute doctrine trop intéressée à nous en spolier et même sur nos plus vieux préjugés, enkystés jusque dans nos vertèbres — celui, par exemple, selon lequel la syntaxe ici nous obligerait à rapporter l'adjectif « calomnié » au nom « ruisseau » : il lui est certes rapporté (et il le demeure, en dessous), mais ce rapport est combattu victorieusement par l'autre rapport, rythmique, qui le renvoie à « la mort ». Ainsi, juste avant la publication en revue, la Mort perd-elle, nécessairement, la majuscule qui l'assurait in extremis de ses prestiges imaginaires et fallacieux. Nécessairement, à la réflexion, mais non pas de manière inévitable, car, si l'on en croit la suite de nos manuscrits, il s'en fallut de peu que Mallarmé n'aperçoive pas le piège qu'il s'était lui-même tendu ! Dans le dernier vers, et dans le dernier mot, était le péril mais aussi gisait la ressource : ne pas laisser se détacher les deux syllabes de « la Mort » pour ne pas donner le dernier mot à l'expression terrorisante de « la Mort ! », tout en prononçant en dernier son nom, mais commun désormais et désarmé, enchaîné qu'il est dans l'hémistiche à la cause de l'erreur et du malentendu qui le glorifiaient, et mis ainsi hors d'état de nuire. Comme il convient à l'histoire et à la nature de la forme sonnet, les décisions du dernier vers donnent le sens de toutes les autres — et alors en effet une voix se laisse entendre, par en dessous : « Où est ta victoire, ô mort ? Où est ton aiguillon, ô mort[11] ? », une voix joueuse et triplement ironique : à l'égard de la Mort (ce n'est donc que cela !) et à l'égard de l'Apôtre (il a raison, mais pas comme il le croit !), mais aussi à l'égard de toutes les formulations même bénignes de l'au-delà (le Styx, le Léthé et autres fables).

Comme dans l'épure d'une bataille figurée au tableau noir, ici chaque moment de l'action conserve tout en le résolvant l'état des forces en présence et les traces de la décision. Ainsi, à la limite, il suffit qu'il y ait à tel endroit du texte tel ou tel possible rigoureusement déterminable (selon la grammaire, la prosodie et la métrique, le sens…) pour que l'on puisse soupçonner et construire une décision, et laquelle. Dès lors se dessine un mouvement de cette bataille interminable livrée aux mythes de la Mort : lever les lourdes dalles de nos cimetières en les transfigurant dans les espèces de meules posées sur la tranche qui fermaient les tombeaux-cavernes du temps de Jésus, mais veiller à désamorcer aussitôt le piège de la Résurrection par la dénonciation de la piété des fidèles de Verlaine puis par les suggestions virgiliennes du chant de l'oiseau et de la naissance de l'enfant, tout en décelant un nouveau genre de linceul dans ce chant ; reprendre la scène pascale, mais détourner l'image de ce jardin célèbre en terrain de jeux ; prolonger la critique des images des Bucoliques en dévoilant leur répondant ancien du Styx et réfuter la logique de cette sagesse encore trop humaine et trop « poétique » par une manœuvre ultime de la poétique : une charge qui dénonce et emporte la calomnie infligée à la mort, en un vers qui tire sa force d'impact non pas d'une quelconque liberté prise avec la syntaxe et la prosodie mais, bien au contraire, de leur maniement rigoureux. Cependant si cette bataille-là est gagnée (et encore…), la guerre se poursuit : jamais la puissance d'un sonnet, si déterminante fût-elle, n'abolira la puissance nocive des idéologies de la Mort.

Le style de la décision

La décision est un geste et le geste a son style. Comme souvent dans ses vers et ses proses, le style ici de Mallarmé est celui de l'autorité : net, tranchant même et d'une certaine manière impérieux, il affirme une souveraineté. Il porte aussi le caractère du dépouillement et de l'élégance. Remplacer une majuscule par sa minuscule, maintenir envers et contre tout une césure là où elle tombait selon la mesure de l'alexandrin, remplacer un « pas » par un « ni », et provoquer par ces décisions ponctuelles et quelquefois minimes des changements décisifs d'accent, de direction et de signification, telle est la loi de l'économie mallarméenne du sens.

Mais aussi, mais surtout, le style de Mallarmé c'est celui d'un joueur. Au vers 6, créer une césure vive sur l'adjectif « immatériel » et un saut brutal de la voix vers le nom monosyllabique de « deuil » ; changer de pied au vers 7, en passant, pour un seul vers, à l'alexandrin ternaire de Hugo ; bouleverser la syntaxe au dernier instant du vers 1 en substituant à un verbe en trois ou en deux syllabes (quelque chose comme *« environne » ou bien *« malmène »…, « que » étant compris alors comme le pronom relatif complément d'objet) une expression en deux syllabes qui rétroactivement découvre à la fois le « que » comme la conjonction de subordination, l'objet donc de ce courroux et l'action très particulière de ce souffle-là, spirituel, capable de rouler de côté la pierre d'un sépulcre, voilà des décisions destinées à décontenancer le lecteur : dans ce qu'il sait (ou dans ce qu'il croit savoir) de la prosodie, de la métrique et de la grammaire, dans sa culture (dernière syllabe du vers : où roule-t-on la pierre d'un tombeau, sinon dans les évangiles ?), — dans ce qu'il croit savoir de la mort. Jouer par la surprise, par l'ironie, lancer des dés pour qu'ils soient rattrapés et relancés, mais toujours loyalement : non pas mettre du trouble dans les lois ni se permettre des licences même autorisées, mais au contraire porter à leur dernière rigueur les lois de la syntaxe et de la métrique ; non pas mettre à plaisir de l'obscurité dans les choses, mais au contraire porter les clartés de la raison poétique dans ce qui n'a pas de raison ou qui en a trop, entendons dans nos dénégations de ce que c'est que la mort. Nous prendre nous lecteurs pour des joueurs, nous respecter comme tels, nous aborder par ce que nous savons ou devrions savoir, par notre goût de l'irresponsabilité mais aussi par ce que possiblement nous avons de meilleur et de jamais parachevé : notre sens de la langue et de la poétique, et notre désir ambigu d'immortalité. (Pascal jouait-il autrement avec son libertin, et La Rochefoucauld avec ses amis et amies des salons aristocratiques, certes l'un et l'autre en moins gai et en plus brutal[12] ?)

La décision inaugure une suite indéterminée d'effets. Car il y a — il y aura toujours quelque joueur qui, se laissant intéresser à cette partie, fasse rejouer, bien ou mal, telle décision de l'auteur, en ce monde-ci et non au-delà, selon ses compétences et suivant les lois de la langue et de la poésie (même celles-ci devenues mortes), — des lois arbitraires et strictes, c'est-à-dire purement et simplement humaines, car elles-mêmes mortelles. Rejouée, la décision inaugure à nouveau pour le joueur la surprise du sens, et atteste à vif la pérennité de ce jeu et du jeu poétique en général. Pérenniser sa décision comme telle et par là se pérenniser, non pas ressusciter.

Et même : la mort étant reconnue comme ce qu'elle est, alors il y a présence du poète en toute sa poésie (Verlaine) et singulièrement en son poème (Mallarmé), présence réelle, avertissement permanent (un monument, de monere), une espèce de « Faites ceci en mémoire de moi » mais avec cette différence, essentielle : la condition de la pleine efficience de ce genre de présence dans les Lettres, c'est justement que soit levée à chaque fois l'hypothèque de quelque au-delà que ce soit.

La décision ici appartient donc moins à la sphère et aux problématiques de la pragmatique et de la communication qu'à celles de l'éthique — étant précisé encore que celle-ci n'est pas envisagée sous la problématique de la raison pratique mais sous celle de l'exigence morale immédiate et des déterminations qu'elle produit en vue de faire exister ce qui n'est pas. Contre l'acception communément reçue de la mort, on combat pour ce que la mort doit être, au moins en ce qui concerne le poète. Ce combat, Mallarmé le mène pour Verlaine, mais il l'avait mené aussi pour Poe, pour Baudelaire et, dès 1872, il l'avait mené en faveur de Gautier, dans son Toast funèbre où déjà le tombeau revêtait l'image d'« [un] sépulcre solide où gît tout ce qui nuit/ Et l'avare silence et la massive nuit », le poète étant, déjà, l'évadé de ce tombeau :

Ô vous tous ! oubliez une croyance sombre

Le splendide génie éternel n'a pas d'ombre[13].

Mais si, à la différence des autres Tombeaux et par décision probablement, celui-ci ne porte pas au frontispice le nom de Verlaine, c'est que c'est aussi le tombeau de Mallarmé, lui-même l'ayant ainsi prévu et préparé comme un espace ouvert à tous et définitivement si possible, sans savoir sans doute qu'il mourrait moins de deux ans plus tard, en septembre 1898. Il y demeure, se jouant toujours de et avec nous : nous attendant d'avance au point de nos trébuchements, nous provoquant sans cesse à le découvrir tellement vivant et, en somme, innocent à sa manière, qui n'est évidemment pas celle de Verlaine.

Moments de l'immortalité. Dirons-nous même d'éternité ? Oui, si nous les entendons au sens de Spinoza : si nous éprouvons et comprenons, à tel point de tel poème et dans tel vers, d'une manière momentanée mais certaine, la loi de ce que c'est que la mort, en reconnaissant la loi de ce que c'est que l'alexandrin et la participiale, c'est-à-dire en faisant l'expérience de la loi de la nature (de notre nature) telle qu'elle se manifeste dans une pensée en apparence des plus futiles et des plus précaires. « At nihilominus sentimus experimurque nos aeternos esse, Et néanmoins nous sentons et nous éprouvons que nous sommes éternels[14]. » Ce « néanmoins » pourrait bien représenter l'esprit même de Mallarmé : contre notre condition d'êtres sujets à l'erreur et à l'illusion et à travers justement l'expérience de cette illusion (comprise en ses causes et autant que possible menée au bout) et de l'espèce de contingence de notre occupation (poétique), nous sommes capables au moins d'immortalité et peut-être même d'éternité. Ainsi l'immortalité poétique ne saurait passer par une résurrection, c'est-à-dire par l'abnégation de la vie terrestre : proposition morale s'il en est en ce qu'elle reconnaît, contre toute tentative de récupération et contre toute tentation de laisser-aller, la valeur éminente de l'ici-bas, si indigne que parût être la vie de Verlaine, ou de Poe[15].

Au passage, mesurons ici la différence et le trajet parcouru depuis le « Tel qu'en Lui-même enfin l'éternité le change » du Tombeau d'Edgar Poe[16]. L'intention polémique était là aussi, celle d'inscrire un bas-relief au tombeau de Baltimore comme un avertissement à ses compatriotes et à toute personne qui l'aurait méconnu d'avoir à respecter désormais en ce poète l'être qu'abrite ce « calme bloc ici-bas chu d'un désastre obscur[17] ». Mais justement la mort est encore exaltée en ce poème-là, comme triomphant dans la voix du poète (v. 4) ; la pierre du tombeau est tombée de là-haut et d'un côté elle oppose sa « borne » au monde des injures à Poe, faites ou à venir (v. 13-14), tandis que de l'autre elle lui ouvre enfin cette immortalité qui seule le rend (« le change » au présent de l'indicatif : c'est un fait) ou/et le rende (« le change » au présent du subjonctif : c'est un vœu, ou une prière) lui-même absolument adéquat à « Lui-même ». Rien que cette majuscule fait décision, et dans un sens opposé à celui du poème sur Verlaine. La posture alors était défensive et la pensée, somme toute, encore chrétienne.

Qu'est-ce qu'un poète, en tant que poète, peut produire comme actes dans l'ordre de l'éthique ? Celui-ci essentiellement : un avertissement écrit sur une tombe à l'intention du passant. Le rappel d'un nom et d'une vie, de poète, par un poète vivant, en vue de faire comprendre comment Verlaine ou Poe ou Baudelaire continuent d'être vivants — et comment Mallarmé continue de vivre. Au nom de ces poètes — et, différemment, de lui-même —, mais sans dire « Je », ni pour eux ni pour lui : impersonnellement délivrer une morale sans moralisme et qui combatte contre trois doxai : non, la vie humaine de ces poètes ne fut pas irresponsable et sans dignité ; non, la mort n'ouvre pas pour les poètes une existence absolument différente d'une vie trop humaine ; non, la poésie n'appartient ni à la sphère de l'insignifiance ni à l'ordre du sacré.

Encore faut-il que le geste de cette inscription ne revête pas la forme définitive d'une injonction formelle ni la vaine autorité de ces stèles dont la matérialité trop assurée offusque à coup sûr le mode tout mémoriel de l'immortalité poétique[18]. Ce tombeau porte donc une parole et non un texte gravé dans le marbre, une invite certes impérieuse mais labile, adressée à tout humain de bonne volonté, en tant justement qu'il passe par là.

« Du texte à l'action »

À un certain moment de sa réflexion philosophique, Ricœur entreprit pour son propre compte « la réinscription progressive de la théorie du texte dans la théorie de l'action[19] ». Dans ce cheminement et dans les modalités qu'il observa, il y a pour nous de quoi nous aider ici à préciser la notion de décision telle qu'elle peut être à l'œuvre dans la poésie.

Travaillant sur la métaphore puis sur le récit et rencontrant dans ce deuxième cas les apories attachées à toute réflexion sur le temps, celui qui fut d'abord un philosophe de la volonté et du symbolique avant de travailler à l'analyse sémiotique et sémantique des textes remet au centre de son herméneutique le souci de l'éthique, et simultanément se tourne vers les œuvres littéraires. Certes dans un esprit et avec des objectifs différents de ceux que nous mettons ici en œuvre, il trouve dans Thomas Mann, Virginia Woolf et Proust des modes de tentative de résolution de ces apories, lesquels consistent en configurations narratives.

Mais ce qui nous retient ici dans Ricœur c'est plus directement la notion de l'initiative. « Il faut, écrit-il, […] penser le commencement comme acte de commencer. Non plus ce qui arrive mais que nous faisons arriver[20]. » Et il ajoute : « […] toute initiative est une intention de faire et, à ce titre, un engagement à faire, donc une promesse que je fais silencieusement à moi-même et tacitement à autrui, dans la mesure où celui-ci en est, sinon le bénéficiaire, du moins le témoin. La promesse, dirai-je, est l'éthique de l'initiative. » Et, au terme de son analyse, il énumère quatre caractéristiques de l'initiative ainsi entendue :

[…] premièrement, je peux (potentialité, puissance, pouvoir) ; deuxièmement, je fais (mon être, c'est mon acte) ; troisièmement, j'interviens (j'inscris mon acte dans le cours du monde : le présent et l'instant coïncident) ; quatrièmement, je tiens ma promesse (je continue de faire, je persévère, je dure).

Ainsi, à notre sens, Mallarmé prend-il une initiative en faveur de Verlaine, et de lui-même : dans le déroulé malheureux de l'histoire morale des hommes, je peux créer les événements inauguraux d'un nouveau cours, celui-ci n'eût-il la durée que d'un sonnet. Ainsi, de son côté, le lecteur de Mallarmé est-il plus qu'un témoin, c'est un acteur de la poésie, à l'intention duquel le poète engage une action originaire autant de fois réitérable qu'il y aura de lecteurs et tant qu'il y en aura, une action qui promette à chacun de tous les joueurs possibles, par le fait même de leur lecture et à condition que chacun y mette du sien, l'assurance de durer contre le fait de la mort, par et dans la poésie. Évidemment ce n'est qu'une promesse : fragile et non autrement garantie, comme effectivité et comme valeur, que par son propre mouvement. Par là, bien sûr, la décision, en matière de poétique comme en toute autre matière, s'expose à la gratuité possible de tout mouvement qui se produit comme causa sui. Mais c'est une promesse nécessaire. Car on ne saurait démontrer à personne l'inanité des idéologies de la Mort. Il faut l'éprouver soi-même comme une découverte et dans une sorte de révolte, et les attaquer par un mouvement de la conviction qui vaut décision : il faut trancher ce nœud que la calomnie a noué en nous contre la vie. On ne prend conscience de ces illusions aliénantes et on n'en sort que par un mouvement de libération posé a priori, lequel ne vaut finalement que s'il est pour tous et même, peut-être, un jour, par tous[21].

 

 

Pour explorer la notion de décision en littérature, l'intérêt de retenir plutôt un poème de Mallarmé (mais cela vaudrait aussi dans le cas de l'une de ses grandes proses), c'est que l'on choisit un texte qui se propose essentiellement de développer une protestation morale, cela d'une manière très rigoureuse et avec la volonté de gouverner les événements de l'ordre du sens, autant qu'il est poétiquement et donc humainement possible.

Pierre Campion



[1] Je reprends ici, mais dans une autre perspective, certains éléments d'une analyse parue dans mon livre La Réalité du réel, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2003, p. 47-50.

[2] Dans son édition, Bertrand Marchal compte six variantes : Mallarmé, Œuvres complètes, tome I, Paris, Gallimard, Bibl. de la Pléiade, 1998, p. 1196-1197 (texte du poème, p. 39). Je les évoquerai au besoin de l'analyse.

[3] Cf. Pierre Campion, Mallarmé. Poésie et philosophie, Paris, PUF, coll. Philosophies, 1994, étude dans laquelle j'ai exposé les principes du sens comme stratégie dans Mallarmé.

[4] Mallarmé, Œuvres complètes, op. cit., p. 1196.

[5] Virgile, première Bucolique, vers 56-59 : « Hinc alta sub rupe canet frondator ad auras ;/ Nec tamen interea raucae, tua cura, palumbes,/ Nec gemere aeria cessabit turtur ab ulmo. » Traduction de Valéry : « Le chant de l'émondeur s'élèvera dans l'air/ Et d'une rauque voix tes colombes chéries/ Ne cesseront pour toi de se plaindre sur l'orme. » Ici le jeu des négations coordonnées est complet.

[6] Dans Mallarmé, ces surdéterminations de deux significations en vue de former un sens complexe et problématique sont fréquentes. On en proposera une autre encore ci-dessous, à propos du vers 14.

[7] On trouve le même thème dans le Sonnet — « Sur les bois oubliés quand passe l'hiver sombre…, op. cit. p. 66-67 : « Qui veut souvent avoir la Visite ne doit/ Par trop de fleurs charger la pierre que mon doigt/ Soulève avec l'ennui d'une force défunte » dit la morte à son survivant.

[8] Cette découverte est racontée par Matthieu au chap. 28 de son évangile, par Marc au chap. 16, par Luc au chap. 24, par Jean au chap. 20. C'est dans Luc que deux hommes en vêtements éblouissants interpellent les femmes : « Pourquoi cherchez-vous parmi les morts celui qui est vivant ? Il n'est pas ici : il est ressuscité. »

[9] Sonnet Quand l'ombre menaça de la fatale loi, dans Mallarmé, op. cit., p. 36. Ce qui ne meurt jamais en nous, c'est l'idée de Dieu.

[10] En syntaxe française, dans une participiale, le participe passé ne s'accorde pas si son sujet est placé après lui : fini la comédie.

[11] Paul, citant lui-même la parole de l'Écriture : première épître aux Corinthiens, 15, 54.

[12] Dans ces batailles d'hommes, le plus provocateur et le plus brutal, c'est Rimbaud.

[13] Mallarmé, « Toast funèbre », op. cit., p. 27-28.

[14] Spinoza, Éthique, livre V, proposition XXIII, scolie. Voir sur ce thème le beau livre de Pierre-François Moreau, Spinoza. L'expérience et l'éternité, Paris, PUF, coll. Épiméthée, 1994.

[15] Voir le texte du discours que Mallarmé prononça sur la tombe de Verlaine lors de son enterrement : « Apprenons, messieurs, au passant, à quiconque, absent, certes, ici, par incompétence et vaine vision se trompa sur le sens extérieur de notre ami, que cette tenue, au contraire, fut, entre toutes, correcte. […] La solitude, le froid, l'inélégance et la pénurie, qui sont des injures infligées auxquelles leur victime aurait le droit de répondre par d'autres volontairement faites à soi-même — ici la poésie a presque suffi — d'ordinaire composent le sort qu'encourt l'enfant avec son ingénue audace marchant en l'existence selon sa divinité : soit, convint le beau mort, il faut ces offenses, mais ce sera jusqu'au bout, douloureusement et impudiquement » Mallarmé, Œuvres complètes, tome II, Paris, Gallimard, Bibl. de la Pléiade, 2003, p. 119-120.

[16] La première version de ce poème date de 1877 et sa version définitive de 1887.

[17] Même s'il vaut avertissement, le « Tombeau » écrit par Mallarmé est un ornement de celui de Poe (v. 11) et une sorte de dédicace, comme le disait le premier titre « Au tombeau d'Edgar Poe ».

[18] Philippe Jaccottet : « Peut-être maintenant qu'il n'y a plus de stèle/ n'y a-t-il plus d'absence ni d'oubli » « Arbres II », dans Poésie 1946-1967, Gallimard, coll. Poésie, p. 139.

[19] Paul Ricœur, Du texte à l'action. Essais d'herméneutique II, Paris, Seuil, coll. Points-Essais, 1986, p. 8.

[20] Paul Ricœur, « L'Initiative », op. cit., p. 298 puis p. 301.

[21] Ce “peut-être un jour” est celui du Livre…

 

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