Pierre Campion Plein nord. Mis en ligne le 8 juillet 2001. Plein nord, par les chenauxSur
ces dômes couleur d’ardoise, nul
ne saurait écrire, même
de ces bâtons qu’on effaçait enfant d’un coup de
manche, même des runes, nul
sinon réveillées un jour peut-être les forces qui ont
tracé ici, à la longueur des ères, dans l’épaisseur
du granite, tel trait de blanc, de gris, de mica demeuré ignoré
tant qu’un ancien glacier ne l’a eu repassée selon la
logique de sa seule masse et sous l’angle approprié, cela
sans que nous y fussions pour quelque chose, ni elles naturellement, ni rien
qui ressemblât à quelque intention, sans
pour autant que nous ne puissions y déchiffrer, à
l’évidence de nos schémas, certaines durées, certains
enjeux, et les espèces de calculs déposés là en
nombre presque infini, ces
opérations inscrites non
à jamais mais pour assez de temps, avant et après nous, le
temps qu’il fallait pour que nous puissions nous faire, à ce jour
momentanément perpétuel, telle idée fugitive de
l’éternité comme
le point de vue trop adéquat à notre exigence absurde et vraie de
l’immortalité. 22-24 juin 2001 Pierre Campion
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