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EN FEUILLETANT HUGO

Nuages
Nuages sur Kerguelen         Photo : Jacques Buffin ©

Oh ! regardez le ciel ! cent nuages mouvants,
Amoncelés là-haut sous le souffle des vents,
          Groupent leurs formes inconnues ;
Sous leurs flots par moments flamboie un pâle éclair,
Comme si tout à coup quelque géant de l'air
          Tirait son glaive dans les nues.

Victor Hugo, Les Feuilles d'automne, xxxv, « Soleils couchants ».

 

Sur cette page,
les 28 passages de Victor Hugo
successivement portés sur la page d'accueil,
entre le 27 mai et le 30 décembre 2001,
dans l'attente du bicentenaire.

Pour lire 23 micro-études sur certains de ces textes et sur d'autres : aller à la page de 2002 l'année Hugo qui donne les liens vers ces études.


Extrait du 27 mai 2001

Les dieux, qui pour nous sont des marbres,
Vivent dans vos livres jumeaux.
Comme des oiseaux dans les arbres,
Ils volent dans vos grands rameaux !

Toute la lyre, IV, xxviii.
(Il s'agit d'Hésiode et d'Homère.)


Extrait du 13 juin 2001

« […]
» Et paix, vertu, bonheur, espérance, bonté,
» O fruits divins, tombez des branches éternelles ! »

Ainsi, vous parliez, voix, grandes voix solennelles ;
Et Virgile écoutait comme j'écoute, et l'eau
Voyait passer le cygne auguste, et le bouleau
Le vent, et le rocher l'écume, et le ciel sombre
L'homme… Ô nature ! abîme ! immensité de l'ombre !

Les Contemplations, V, xxvii, « Mugitusque boum ».


Extrait du 17 juin 2001

On comprendra bientôt généralement que les écrivains doivent être jugés, non d'après les règles et les genres, choses qui sont hors de la nature et hors de l'art, mais d'après les principes immuables de cet art et les lois spéciales de leur organisation personnelle. […] On consentira, pour se rendre compte d'un ouvrage, à se placer au point de vue de l'auteur, à regarder le sujet avec ses yeux. On quittera, et c'est M. de Chateaubriand qui parle ici, la critique mesquine des défauts pour la grande et féconde critique des beautés. Il est temps que tous les bons esprits saisissent le fil qui lie fréquemment ce que, selon notre caprice particulier, nous appelons défaut à ce que nous appelons beauté. Les défauts, du moins ce que nous nommons ainsi, sont souvent la condition native, nécessaire, fatale, des qualités.

Préface de Cromwell.


Extrait du 28 juin 2001

L'espoir mène à des portes closes.
Cette terre est pleine de choses
Dont nous ne voyons qu'un côté.
Le sort de tous nos vœux se joue ;
Et la vie est comme la roue
D'un char dans la poudre emporté !

Toute la lyre,III, xviii.


Extrait du 8 juillet 2001

Qui dit poëte dit en même temps et nécessairement historien et philosophe. Hérodote et Thalès sont inclus dans Homère. Shakespeare, lui aussi, est cet homme triple. Il est en outre le peintre, et quel peintre ! Le peintre colossal. Le poëte en effet fait plus que raconter, il montre. Les poëtes ont en eux un réflecteur, l'observation, et un condensateur, l'émotion ; de là ces grands spectres lumineux qui sortent de leur cerveau, et qui s'en vont flamboyer à jamais sur la ténébreuse muraille humaine. Ces fantômes sont. Exister autant qu'Achille, ce serait l'ambition d'Alexandre.

William Shakespeare, II, I, ii.


Extrait du 15 juillet 2001

[…]

Envieux, vous mordrez la base des statues.
Oiseaux, vous chanterez ! vous verdirez, rameaux !
Portes, vous croulerez de lierres revêtues.
Cloches, vous ferez vivre et rêver les hameaux.

Teignant votre nature aux mœurs de tous les hommes,
Voyageurs, vous irez comme d'errants flambeaux ;
Vous marcherez pensifs sur la terre où nous sommes,
En vous ressouvenant quelquefois des tombeaux.

[…]

Moi, je contemplerai le Dieu père du monde,
Qui livre à notre soif, dans l'ombre ou la clarté,
Le ciel, cette grande urne, adorable et profonde,
Où l'on puise le calme et la sérénité !

Les Rayons et les Ombres, xvi.


Extrait du 22 juillet 2001

Ce livre est un drame dont le premier personnage est l'infini.
L'homme est le second.
Cela étant, comme un couvent s'est trouvé sur notre chemin, nous avons dû y pénétrer. Pourquoi ? C'est que le couvent, qui est propre à l'orient comme à l'occident, à l'antiquité comme aux temps modernes, au paganisme, au bouddhisme, au mahométisme, comme au christianisme, est un des appareils d'optique appliqués par l'homme sur l'infini.
[…] Quelle contemplation pour l'esprit et quelle rêverie sans fond ! la réverbération de Dieu sur le mur humain.

Les Misérables : II, Cosette : livre VII, Parenthèse ; « 1. Le couvent, idée abstraite ».


Extrait du 28 juillet 2001

Il te ressemble ; il est terrible et pacifique.
Il est sous l'infini le niveau magnifique ;
Il a le mouvement, il a l'immensité.
Apaisé d'un rayon et d'un souffle agité,
Tantôt c'est l'harmonie et tantôt le cri rauque.
Les monstres sont à l'aise en sa profondeur glauque ;
La trombe y germe ; il a des gouffres inconnus
D'où ceux qui l'ont bravé ne sont pas revenus ;
[…]
Il a la force rude et la grâce superbe ;
Il déracine un roc, il épargne un brin d'herbe ;
Il jette comme toi l'écume aux fiers sommets,
Ô Peuple  seulement, lui, ne trompe jamais
Quand, l'œil fixe, et debout sur la grève sacrée,
Et pensif, on attend l'heure de sa marée.

Les Châtiments : Livre VI, La stabilité est assurée : ix, « Au Peuple ».


Extrait du 4 août 2001

L'arbre Éternité vit sans faîte et sans racines.
[ …]

Et nous apercevons, dans le plus noir de l'arbre,
Les Hobbes contemplant avec des yeux de marbre
        Les Kant aux larges fronts ;
Leur cognée à la main, le pied sur les problèmes,
Immobiles ; la mort a fait des spectres blêmes
        De tous ces bûcherons.

Ils sont là, stupéfaits et chacun sur sa branche,
L'un se redresse, et l'autre, épouvanté se penche.
        L'un voulut, l'autre osa.
Tous se sont arrêtés en voyant le mystère.
Zénon rêve tourné vers Pyrrhon, et Voltaire
        Regarde Spinosa.

Qu'avez-vous donc trouvé, dites, chercheurs sublimes ?
Quels nids avez-vous vus, noirs comme des abîmes
        Sur ces rameaux noueux ?
Cachaient-ils des essaims d'ailes sombres ou blanches ?
Dites, avez-vous fait s'envoler de ces branches
        Quelque aigle monstrueux ?

Les Contemplations : Livre VI, Au bord de l'infini, VI : « Pleurs dans la nuit », xvi.


Extrait du 13 août 2001

L'un vers l'autre nous allons.
Il dit : « O belle des belles,
La rose est sous tes talons,
L'astre frémit dans tes ailes ! »

Je dis : « La terre a cent rois ;
Les jeunes gens sont sans nombre ;
Mais c'est lui que j'aime, ô bois !
Il est flamme, et je suis ombre. »

Il reprend : « Viens avec moi
Nous perdre au fond des vallées
Dans l'éblouissant effroi
Des sombres nuits étoilées. »

Et j'ajoute : « Je mourrais
Pour un baiser de ta bouche;
Vous le savez, ô forêts,
O grand murmure farouche ! »

L'eau coule, le ciel est clair.
Nos chansons aux vents semées,
Se croisent comme dans l'air
Les flèches de deux armées.

La Fin de Satan : II, Jésus-Christ, II : « Le Cantique de Bethphagé ».


Extrait du 21 août 2001

Souvent, la nuit, on voyait errer une forme hideuse sur la frêle balustrade découpée en dentelle qui couronne les tours et borde le pourtour de l'abside ; c'était encore le bossu de Notre-Dame. Alors, disaient les voisines, toute l'église prenait quelque chose de fantastique, de surnaturel, d'horrible ; des yeux et des bouches s'y ouvraient çà et là ; on entendait aboyer les chiens, les guivres, les tarasques de pierre qui veillent jour et nuit, le cou tendu et la gueule ouverte, autour de la monstrueuse cathédrale ; et si c'était une nuit de Noël, tandis que la grosse cloche qui semblait râler appelait les fidèles à la messe ardente de minuit, il y avait un tel air répandu sur la sombre façade qu'on eût dit que le grand portail dévorait la foule et que la rosace la regardait. Et tout cela venait de Quasimodo. L'Égypte l'eût pris pour le dieu de ce temple ; le moyen-âge l'en croyait le démon ; il en était l'âme.
À tel point que pour ceux qui savent que Quasimodo a existé, Notre-Dame est aujourd'hui déserte, inanimée, morte. On sent qu'il y a quelque chose de disparu. Ce corps immense est vide ; c'est un squelette ; l'esprit l'a quitté, on en voit la place, et voilà tout. C'est comme un crâne où il y a encore des trous pour les yeux, mais plus de regard.

Notre-Dame de Paris : livre IV, chap. III : « Immanis pecoris custos, immanior ipse » [D'un monstrueux troupeau, gardien plus monstrueux encore].


Extrait du 30 août 2001

Le principe de la liberté littéraire, déjà compris par le monde qui lit et qui médite, n'a pas été moins complètement adopté par cette immense foule, avide des pures émotions de l'art, qui inonde chaque soir les théâtres de Paris. Cette voix haute et puissante du peuple, qui ressemble à celle de Dieu, veut désormais que la poésie ait la même devise que la politique : TOLÉRANCE ET LIBERTÉ.
Maintenant vienne le poète ! Il y a un public.
Et cette liberté, le public la veut telle qu'elle doit être, se conciliant avec l'ordre dans l'État, avec l'art dans la littérature. La liberté a une sagesse qui lui est propre, et sans laquelle elle n'est pas complète. Que les vieilles règles de d'Aubignac meurent avec les vieilles coutumes de Cujas, cela est bien. Qu'à une littérature de cour succède une littérature du peuple, cela est mieux encore ; mais surtout qu'une raison intérieure se rencontre au fond de toutes ces nouveautés. Que le principe de liberté fasse son affaire, mais qu'il la fasse bien. Dans les lettres, comme dans la société, point d'étiquette, point d'anarchie, des lois. Ni talons rouges, ni bonnets rouges.

Hernani : Préface.


Extrait du 9 septembre 2001

AVE DEA ; MORITURUS TE SALUTAT


La mort et la beauté sont deux choses profondes
Qui contiennent tant d'ombre et d'azur qu'on dirait
Deux sœurs également terribles et fécondes
Ayant la même énigme et le même secret ;

O femmes, voix, regards, cheveux noirs, tresses blondes,
Brillez, je meurs ! ayez l'éclat, l'amour, l'attrait,
O perles que la mer mêle à ses grandes ondes,
O lumineux oiseaux de la sombre forêt !

Judith, nos deux destins sont plus près l'un de l'autre
Qu'on ne croirait, à voir mon visage et le vôtre ;
Tout le divin abîme apparaît dans vos yeux,

Et moi, je sens le gouffre étoilé dans mon âme ;
Nous sommes tous les deux voisins du ciel, madame,
Puisque vous êtes belle et puisque je suis vieux.

Toute la lyre : V, xxxiv. Hugo s'adresse à Judith Mendès, la fille de Théophile Gautier, quelques mois avant la mort de celui-ci.


Extrait du 18 septembre 2001

Qu'es-tu, passant ? Le bois est sombre,
Les corbeaux volent en grand nombre,
         Il va pleuvoir.
— Je suis celui qui va dans l'ombre.
         Le Chasseur Noir !

Les feuilles des bois, du vent remuées,
         Sifflent… on dirait
Qu'un sabbat nocturne emplit de huées
         Toute la forêt ;
Dans une clairière au sein des nuées
         La lune apparaît.

— Chasse le daim, chasse la biche,
Cours dans les bois, cours dans la friche
         Voici le soir.
Chasse le czar, chasse l'Autriche,
         Ô Chasseur Noir !

Les feuilles des bois —

Souffle en ton cor, boucle ta guêtre,
Chasse les cerfs qui viennent paître
         Près du manoir.
Chasse le roi, chasse le prêtre,
         Ô Chasseur Noir !.

Les feuilles des bois —

[ …]

Les Châtiments : VII, iii, « Le Chasseur Noir ».


Extrait du 27 septembre 2001

[De la fenêtre d'une cellule, le condamné à mort regarde la cour où vient de se tenir le ferrage des galériens, et l'espèce de fête qui s'ensuit. Avec son accord, on l'a conduit là comme à un spectacle : « Vous serez seul dans votre loge, comme le roi. »]

Tout à coup, à travers la rêverie profonde où j'étais tombé, je vis la ronde hurlante s'arrêter et se taire. Puis tous les yeux se tournèrent vers la fenêtre que j'occupais. — Le condamné ! le condamné ! crièrent-ils tous en me montrant du doigt ; et les explosions de joie redoublèrent.
Je restai pétrifié.
J'ignore d'où ils me connaissaient et comment ils m'avaient reconnu.
— Bonjour ! bonsoir ! me crièrent-ils avec leur ricanement atroce. Un des plus jeunes, condamné aux galères perpétuelles, face luisante et plombée, me regarda d'un air d'envie, en disant : — Il est heureux ! il sera rogné ! Adieu, camarade !
Je ne puis dire ce qui se passait en moi. J'étais leur camarade en effet. La Grève est sœur de Toulon. J'étais même placé plus bas qu'eux ; ils me faisaient honneur. Je frissonnai.
Oui, leur camarade ! Et quelques jours plus tard, j'aurais pu aussi, moi, être un spectacle pour eux.
J'étais demeuré à la fenêtre, immobile, perclus, paralysé. Mais quand je vis les cinq cordons s'avancer, se ruer vers moi avec des paroles d'une infernale cordialité ; quand j'entendis le tumultueux fracas de leurs chaînes, de leurs clameurs, de leurs pas, au pied du mur, il me sembla que cette nuée de démons escaladait ma misérable cellule ; je poussai un cri, je me jetai sur la porte d'une violence à la briser ; mais pas moyen de fuir ; les verrous étaient tirés en dehors. Je heurtai, j'appelai avec rage. Puis il me sembla entendre de plus près encore les effrayantes voix des forçats. Je crus voir leurs têtes hideuses paraître déjà au bord de ma fenêtre, je poussai un second cri d'angoisse, et je tombai évanoui.

Le Dernier jour d'un condamné : XIII.


Extrait du 6 octobre 2001

[…]

Qui sait ? que savons-nous ? Sur notre horizon sombre,
Que la création impénétrable encombre
        De ses taillis sacrés,
Muraille obscure où vient battre le flot de l'être,
Peut-être allons-nous voir brusquement apparaître
        Des astres effarés ;

Des astres éperdus arrivant des abîmes,
Venant des profondeurs ou descendant des cimes,
        Et, sous de noirs arceaux,
Entrant en foule, épars, ardents, pareils au rêve,
Comme dans un grand vent s'abat sur une grève
        Une troupe d'oiseaux ;

Surgissant, clairs flambeaux, feux purs, rouges fournaises,
Aigrettes de rubis ou tourbillons de braises,
        Sur nos bords, sur nos monts,
Et nous pétrifiant de leurs aspects étranges ;
Car dans le gouffre énorme il est des mondes anges
        Et des soleils démons !

Peut-être en ce moment, du fond des nuits funèbres,
Montant vers nous, gonflant ses vagues de ténèbres
        Et ses flots de rayons,
Le muet Infini, sombre mer ignorée,
Roule vers notre ciel une grande marée
        De constellations !

« À la fenêtre pendant la nuit », dans Les Contemplations : VI, ix.


Extrait du 13 octobre 2001

Sachez qu'hier, de ma lucarne,
J'ai vu, j'ai couvert de clins d'yeux
Une fille qui dans la Marne
Lavait des torchons radieux.

Près d'un vieux pont, dans les saulées,
Elle lavait, allait, venait ;
L'aube et la brise étaient mêlées
À la grâce de son bonnet.

Je la voyais de loin. Sa mante
L'entourait de plis palpitants.
Aux folles broussailles qu'augmente
L'intempérance du printemps,

Aux buissons que le vent soulève,
Que juin et mai, frais barbouilleurs,
Foulant la cuve de la sève,
Couvrent d'une écume de fleurs,

Aux sureaux pleins de mouches sombres,
Aux genêts du bord, tous divers,
Aux joncs échevelant leurs ombres
Dans la lumière des flots verts,

Elle accrochait des loques blanches,
Je ne sais quels haillons charmants
Qui me jetaient, parmi les branches,
De profonds éblouissements.

[…]

« Choses écrites à Créteil », dans Les Chansons des rues et des bois : I, IV, vii.


Extrait du 20 octobre 2001

Le théâtre est un creuset de civilisation. C'est un lieu de communion humaine. Toutes ses phases veulent être étudiées. C'est au théâtre que se forme l'âme publique.
On vient de voir ce qu'était le théâtre au temps de Shakespeare et de Molière ; veut-on voir ce qu'il était au temps d'Eschyle ?
Allons à ce spectacle.
Ce n'est plus la charrette de Thespis, ce n'est plus l'échafaud de Susarion, ce n'est plus le cirque de bois de Chœrilus ; Athènes, sentant venir Eschyle, Sophocle et Euripide, s'est donné des théâtres de pierre. Pas de toit, le ciel pour plafond, le jour pour éclairage, une longue plate-forme de pierre percée de portes et d'escaliers et adossée à une muraille, les acteurs et le chœur allant et venant sur cette plate-forme qui est le logéum, et jouant la pièce ; au centre, à l'endroit où est aujourd'hui le trou du souffleur, un petit autel à Bacchus, la thymèle ; en face de la plate-forme, un vaste hémicycle de gradins de pierre, cinq ou six mille hommes assis là pêle-mêle ; tel est le laboratoire. C'est là que la fourmilière du Pirée vient se faire Athènes ; c'est là que la multitude devient le public, en attendant que le public devienne le peuple. La multitude est là en effet ; toute le multitude, y compris les femmes, les enfants et les esclaves, et Platon qui fronce le sourcil.

William Shakespeare : I, IV, ii.


Extrait du 27 octobre 2001

[…]
Ah ! nous vous connaissons ! nous connaissons le parti clérical. C'est un vieux parti qui a des états de service. (On rit.) C'est lui qui monte la garde à la porte de l'orthodoxie. (On rit.) C'est lui qui a trouvé pour la vérité ces deux étais merveilleux, l'ignorance et l'erreur. C'est lui qui fait défense à la science et au génie d'aller au delà du missel et qui veut cloîtrer la pensée dans le dogme. Tous les pas qu'a faits l'intelligence de l'Europe, elle les a faits malgré lui. Son histoire est écrite dans l'histoire du progrès humain, mais elle est écrite au verso. (Sensation.) Il s'est opposé à tout. (On rit.)
C'est lui qui a fait battre de verges Prinelli pour avoir dit que les étoiles ne tomberaient pas. C'est lui qui a appliqué Campanella vingt-sept fois à la question pour avoir affirmé que le nombre des mondes était infini et entrevu le secret de la création. C'est lui qui a persécuté Harvey pour avoir prouvé que le sang circulait. De par Josué, il a enfermé Galilée ; de par saint Paul, il a emprisonné Christophe Colomb. (Sensation.) Découvrir la loi du ciel, c'était une impiété ; trouver un monde, c'était une hérésie. C'est lui qui a anathémisé Pascal au nom de la religion, Montaigne au nom de la morale, Molière au nom de la morale et de la religion. Oh ! oui, certes, qui que vous soyez, qui vous appelez le parti catholique et qui êtes le parti clérical, nous vous connaissons. Voilà longtemps déjà que la conscience humaine se révolte contre vous et vous demande : Qu'est-ce que vous me voulez ? Voilà longtemps déjà que vous essayez de mettre un bâillon à l'esprit humain. (Acclamations à gauche.)
Et vous voulez être les maîtres de l'enseignement ! Et il n'y a pas un poëte, pas un écrivain, pas un philosophe, pas un penseur, que vous acceptiez ! Et tout ce qui a été trouvé, rêvé, déduit, illuminé, imaginé, inventé par les génies, le trésor de la civilisation, l'héritage séculaire des générations, le patrimoine commun des intelligences, vous le rejetez ! Si le cerveau de l'humanité était là devant vos yeux, à votre discrétion, ouvert comme la page d'un livre, vous y feriez des ratures ! (Oui ! oui !) Convenez-en ! (Mouvement prolongé.)
[…]

Discours du 15 janvier 1850 sur « La liberté de l'enseignement », dans Actes et Paroles : I, Assemblée législative, 1849-1851.


Extrait du 3 novembre 2001

[Ces mondes]
Ils sont ! ils vont ! ceux-ci brillants, ceux-là difformes,
Tous portant des vivants et des créations !
Ils jettent dans l'azur des cônes d'ombre énormes,
Ténèbres qui des cieux traversent les rayons,
Où le regard, ainsi que des flambeaux farouches
L'un après l'autre éteints par d'invisibles bouches,
Voit plonger tour à tour les constellations !

        Quel Zorobabel formidable,
        Quel Dédale vertigineux,
        Cieux ! a bâti dans l'insondable
        Tout ce noir chaos lumineux ?
        Soleils, astres aux larges queues,
        Gouffres ! ô millions de lieues !
        Sombres architectures bleues !
        Quel bras a fait, créé, produit
        Ces tours d'or que nuls yeux ne comptent,
        Ces firmaments qui se confrontent,
        Ces Babels d'étoiles qui montent
        Dans ces Babylones de nuit ?

Qui, dans l'ombre vivante et l'aube sépulcrale,
Qui, dans l'horreur fatale et dans l'amour profond,
A tordu ta splendide et sinistre spirale,
Ciel, où les univers se font et se défont ?
Un double précipice à la fois le réclame.
« Immensité ! » dit l'être. « Éternité ! » dit l'âme.
À jamais ! le sans fin roule dans le sans fond.
[…]

« Magnitudo parvi », dans Les Contemplations : III, xxx.


Extrait du 10 novembre 2001

[…]
Le cheval luttait ; ses prunelles,
Comme le glaive et l'yatagan,
Brillaient ; il secouait ses ailes
Avec des souffles d'ouragan.

Il voulait retourner au gouffre ;
Il reculait, prodigieux,
Ayant dans ses naseaux le soufre
Et l'âme du monde en ses yeux.

Il hennissait vers l'invisible ;
Il appelait l'ombre au secours ;
À ses appels le ciel terrible
Remuait des tonnerres sourds.

Les bacchantes heurtaient leurs sistres,
Les sphinx ouvraient leurs yeux profonds ;
On voyait, à leurs doigts sinistres,
S'allonger l'ombre des griffons.

Les constellations en flamme
Frissonnaient à son cri vivant
Comme dans la main d'une femme
Une lampe se courbe au vent.

Chaque fois que son aile sombre
Battait le vaste azur terni,
Tous les groupes d'astres de l'ombre
S'effarouchaient dans l'infini.

Moi, sans quitter la plate-longe,
Sans le lâcher, je lui montrais
Le pré charmant, couleur de songe,
Où le vers rit sous l'antre frais.

Je lui montrais le champ, l'ombrage,
Les gazons par juin attiédis ;
Je lui montrais le pâturage
Que nous appelons paradis.

— Que fais-tu là ? me dit Virgile.
Et je répondis, tout couvert
De l'écume du monstre agile :
— Maître, je mets Pégase au vert.

« Le Cheval », dans Les Chansons des rues et des bois.


Extrait du 18 novembre 2001

[…]
À Paris, en 1818 ou 19, un jour d'été, vers midi, je passais sur la place du Palais de Justice. Il y avait là une foule autour d'un poteau. Je m'approchai. À ce poteau était liée, carcan au cou, écriteau sur la tête, une créature humaine, une jeune femme ou une jeune fille. Un réchaud plein de charbons ardents était à ses pieds devant elle, un fer à manche de bois, plongé dans la braise y rougissait, la foule semblait contente. Cette femme était coupable de ce que la jurisprudence appelle vol domestique et la métaphore banale, danse de l'anse du panier. Tout à coup, comme midi sonnait, en arrière de la femme et sans être vu d'elle, un homme monta sur l'échafaud ; j'avais remarqué que la camisole de bure de cette femme avait par derrière une fente rattachée par des cordons ; l'homme dénoua rapidement les cordons, écarta la camisole, découvrit jusqu'à la ceinture le dos de la femme, saisit le fer dans le réchaud et l'appliqua, en appuyant profondément, sur l'épaule nue. Le fer et le poing du bourreau disparurent dans une fumée blanche. J'ai encore dans l'oreille, après plus de quarante ans, et j'aurai toujours dans l'âme l'épouvantable cri de la suppliciée. Pour moi, c'était une voleuse, ce fut une martyre. Je sortis de là déterminé, — j'avais seize ans, — à combattre à jamais les mauvaises action de la loi.
De ces mauvaises actions, la peine de mort est la pire. […]

« Genève et la peine de mort », dans Actes et paroles, II.


Extrait du 25 novembre 2001

Une montagne emplit tout l'horizon des hommes ;
L'Olympe. Pas de ciel. Telle est l'ombre où nous sommes.
L'orgueil, la volupté féroce aux chants lascifs,
La guerre secouant des éclairs convulsifs,
La splendide Vénus, nue, effrayante, obscure,
Le meurtre appelé Mars, le vol nommé Mercure,
L'inceste souriant, ivre, au sinistre hymen,
Le parricide ayant le tonnerre à la main,
Pluton livide avec l'enfer pour auréole,
L'immense fou Neptune en proie au vague Éole,
L'orageux jupiter, Diane à l'œil peu sûr,
Des fronts de météore entrevus dans l'azur,
Habitent ce sommet ; et tout ce que l'augure,
Le flamine, imagine, invente, se figure,
Et vénère à Corinthe, à Syène, à Paphos,
Tout le vrai des autels qui dans la tombe est faux,
L'oppression, la soif du sang, l'âpre carnage,
L'impudeur qui survit à la guerre et surnage,
L'extermination des enfants de Japhet,
Toute la quantité de crime et de forfait
Que de noms révérés la religion nomme,
Et que peut dans la nuit d'un temple adorer l'homme,
Sur ce faîte fatal que l'aube éclaire en vain,
Rayonne ; et tout le mal possible est là, divin.

« Le Titan », dans La Légende des Siècles, nouvelle série, III, iii.


Extrait du 2 décembre 2001

Certes, selon nous, jamais moment n'a été plus propice au drame. Ce serait l'heure, pour celui à qui Dieu en aurait donné le génie, de créer tout un théâtre, un théâtre vaste et simple, un et varié, national par l'histoire, populaire par la vérité, humain, naturel, universel par la passion. Poètes dramatiques, à l'œuvre ! elle est belle, elle est haute. Vous avez affaire à un grand peuple habitué aux grandes choses. Il en a vu et il en a fait.
Des siècles passés au siècle présent, le pas est immense. Le théâtre maintenant peut ébranler les multitudes et les remuer dans leurs dernières profondeurs. Autrefois, le peuple, c'était une épaisse muraille sur laquelle l'art ne peignait qu'une fresque.
Il y a des esprits, et dans le nombre de fort élevés, qui disent que la poésie est morte, que l'art est impossible. Pourquoi ? tout est toujours possible à tous les moments donnés, et jamais plus de choses ne furent possibles qu'au temps où nous vivons. Certes, on peut tout attendre de ces générations nouvelles qu'appelle un si magnifique avenir, que vivifie une pensée si haute, que soutient une foi si légitime en elles-mêmes. L'auteur de ce drame, qui est bien fier de leur appartenir, qui est bien glorieux d'avoir vu quelquefois son nom dans leur bouche, quoiqu'il soit le moindre d'entre eux, l'auteur de ce drame espère tout de ses jeunes contemporains, même un grand poète. Que ce génie, caché encore, s'il existe, ne se laisse pas décourager par ceux qui crient à l'aridité, à la sécheresse, au prosaïsme des temps. Une époque trop avancée ? pas de génie primitif possible ?… – Laisse-les parler, jeune homme ! Si quelqu'un eût dit à la fin du dix-huitième siècle, après le régent, après Voltaire, après Beaumarchais, après Louis XV, après Cagliostro, après Marat, que les Charlemagnes, les Charlemagnes grandioses, poétiques et presque fabuleux, étaient encore possibles, tous les sceptiques d'alors, c'est-à-dire la société tout entière, eussent haussé les épaules et ri. Hé bien ! au commencement du dix-neuvième siècle, on a eu l'empire et l'empereur. Pourquoi maintenant ne viendrait-il pas un poète qui serait à Shakespeare ce que Napoléon est à Charlemagne ?

Préface de Marion de Lorme (août 1831).


Extrait du 9 décembre 2001

[À l'Assemblée nationale, 23 février 1850]

Pendant la séance Lamartine est venu s'asseoir à côté de moi, à la place qu'occupe habituellement M. Arbey. Tout en causant, il jetait à demi-voix des sarcasmes aux orateurs. Thiers parlait. — Petit drôle ! a murmuré Lamartine. Puis est venu Cavaignac. — Qu'en pensez-vous ? me dit Lamartine. Quant à moi voici mon sentiment. Il est heureux, il est brave, il est loyal, il est disert, et il est bête. — À Cavaignac succéda Emmanuel Arago. L'Assemblée était orageuse. — Celui-ci aussi est bête. Il a de trop petits bras pour les efforts qu'il fait. Il se jette volontiers dans les mêlées et ne sait plus comment s'en tirer. La tempête le tente et le tue. — Un moment après Jules Favre monta à la tribune. — Je ne sais pas, me dit Lamartine, où ils voient un serpent dans cet homme-là. C'est un académicien de province.
Tout en riant il prit une feuille de papier dans mon tiroir, me demanda une plume, demanda une prise de tabac à Savatier-Laroche, écrivit quelques lignes. Cela fait, il monta à la tribune et jeta à M. Thiers qui venait d'attaquer son œuvre, la révolution de février, de graves et hautaines paroles. Puis il redescendit à notre banc, me serra la main pendant que la gauche applaudissait et que la droite s'indignait, et vida tranquillement dans sa tabatière la tabatière de Savatier-Laroche.

Victor Hugo : Choses vues, Le Temps présent IV, 1849-1851.


Extrait du 15 décembre 2001

Dieu marchait et allait devant lui. Louis Bonaparte, panache en tête, s'est mis en travers et a dit à Dieu : Tu n'iras pas plus loin !
Dieu s'est arrêté.
Et vous vous figurez que cela est ! et vous vous imaginez que ce plébiscite existe, que cette constitution de je ne sais plus quel jour de janvier existe, que ce sénat existe, que ce conseil d'état et ce corps législatif existent ! Vous vous imaginez qu'il y a un laquais qui s'appelle Rouher, un valet qui s'appelle Troplong, un eunuque qui s'appelle Baroche, et un sultan, un pacha, un maître qui se nomme Louis Bonaparte ! Vous ne voyez donc pas que c'est tout cela qui est chimère ! vous ne voyez donc pas que le Deux-Décembre n'est qu'une immense illusion, une pause, un temps d'arrêt, une sorte de toile de manœuvre derrrière laquelle Dieu, ce machiniste merveilleux, prépare et construit le dernier acte, l'acte suprême et triomphal de la révolution française ! Vous regardez stupidement la toile, les choses peintes sur ce canevas grossier, le nez de celui-ci, les épaulettes de celui-là, le grand sabre de cet autre, ces marchands d'eau de Cologne galonnés que vous appelez des généraux, ces poussahs que vous appelez des magistrats, ces bonshommes que vous appelez des sénateurs, ce mélange de caricatures et de spectres, et vous prenez cela pour des réalités ! Et vous n'entendez pas au-delà, dans l'ombre, ce bruit profond ! vous n'entendez pas quelqu'un qui va et vient ! vous ne voyez pas trembler cette toile au souffle qui est derrière !

Napoléon le Petit, Conclusion II, fin.


Extrait du 23 décembre 2001

26 mars [1847] — J'ai été à l'enterrement de Mlle Mars. […] J'entendais les chants des morts qui venaient jusqu'à moi, et tout autour de moi les propos et les cris de la foule. Rien n'est triste comme un enterrement ; on ne voit que des gens qui rient. Chacun accoste gaîment son voisin et cause de ses affaires. […] Le peuple de Paris est comme le peuple d'Athènes, léger mais intelligent. Il y avait là des gens en blouse et en manches retroussées qui disaient des choses vraies et vives sur le théâtre, sur l'art, sur les poëtes. Ils cherchaient et nommaient dans la foule les noms célèbres. Il faut à ce peuple de la gloire. Quand il n'a pas de Marengo et d'Austerlitz, il veut et il aime les Dumas et les Lamartine. Cela est lumineux et ses yeux y courent.
Je suis resté sous le péristyle, abrité du soleil par une colonne. Quelques poëtes m'avaient rejoint et m'entouraient, Joseph Autran, Adolphe Dumas, Hippolyte Lucas, Auguste Maquet. Alexandre Dumas est venu à nous avec son fils. La foule le reconnaissait à sa tête chevelue, et le nommait.
Vers une heure le corps est sorti de l'église, et tout le monde.
Les propos éclataient parmi les assistants :
— Ah ! voilà Bouffé ! — Où est donc Arnal ? — Le voici. — Tiens, ceux-ci en noir sont les sociétaires du Théâtre-Français. —  Le Théâtre-Français assiste à son propre enterrement. — Voilà les femmes. Mme Volnys, Mme Guyon, Rose Chéri. — Celle-ci, c'est Déjazet ; elle n'est plus très jeune  cela doit lui donner à réfléchir. Etc., etc.
Le corbillard s'est mis en mouvement, et nous avons tous suivi à pied. Derrière nous venaient une douzaine de voitures de deuil, et quelques calèches où il y avait des actrices. Il y avait bien dix mille personnes à pied. Cela faisait un flot sombre qui avait l'air de pousser devant lui le corbillard cahotant ses immenses panaches noirs.
Des deux côtés du boulevard il y avait une autre foule qui faisait la haie. Des femmes en chapeaux roses étaient assises souriantes sur les espèces de degrés que font les trottoirs. Les balcons étaient encombrés de monde. Vers la Porte Saint-Martin, j'ai quitté le convoi, et je m'en suis allé pensif.

Choses vues, Faits contemporains.


Extrait du 30 décembre 2001

À THÉOPHILE GAUTIER

[…]
Lorsqu'un vivant nous quitte, ému, je le contemple ;
Car entrer dans la mort, c'est entrer dans le temple
Et qaund un homme meurt, je vois distinctement
Dans son ascension mon propre avènement.
Ami, je sens du sort la sombre plénitude ;
J'ai commencé la mort par de la solitude,
Je vois mon profond soir vaguement s'étoiler.
Voici l'heure où je vais, aussi moi, m'en aller.
Mon fil trop long frissonne et touche presque au glaive ;
Le vent qui t'emporta doucement me soulève,
Et je vais suivre ceux qui m'aimaient, moi banni.
Leur œil fixe m'attire au fond de l'infini.
J'y cours. Ne fermez pas la porte funéraire.

Passons ; car c'est la loi ; nul ne peut s'y soutraire 
Tout penche ; et ce grand siècle avec tous ses rayons
Entre en cette ombre immense où pâles nous fuyons.
Oh ! quel farouche bruit font dans le crépuscule
Les chênes qu'on abat pour le bûcher d'Hercule !
Les chevaux de la mort se mettent à hennir,
Et sont joyeux, car l'âge éclatant va finir ;
Ce siècle altier qui sut dompter le vent contraire,
Expire… — Ô Gautier ! toi, leur égal et leur frère,
Tu pars après Dumas, Lamartine et Musset.
L'onde antique est tarie où l'on rajeunissait ;
Comme il n'est plus de Styx il n'est plus de Jouvence.
Le dur faucheur avec sa large lame avance
Pensif et pas à pas vers le reste du blé ;
C'est mon tour ; et la nuit emplit mon œil troublé
Qui, devinant, hélas, l'avenir des colombes,
Pleure sur des berceaux et sourit à des tombes.

Victor Hugo : « À Théophile Gautier », poème publié en 1872, dans le recueil Tombeau de Théophile Gautier, où se trouvait aussi, entre autres hommages, le « Toast funèbre » de Mallarmé.
Dont voici un passage :

Le Maître, par un œil profond a, sur ses pas,
Apaisé de l'éden l'inquiète merveille
Dont le frisson final, dans sa voix seule, éveille
Pour la Rose et le Lys le mystère d'un nom.
Est-il de ce destin rien qui demeure, non ?
Ô vous tous ! oubliez une croyance sombre.
Le splendide génie éternel n'a pas d'ombre.
Moi, de votre désir soucieux, je veux voir,
À qui s'évanouit, hier, dans le devoir,
Idéal que nous font les jardins de cet astre,
Survivre pour l'honneur du tranquille désastre
Une agitation solennelle par l'air
De paroles, pourpre ivre et grand calice clair,
Que, pluie et diamant, le regard diaphane
Resté là sur ces fleurs dont nulle ne se fane,
Isole parmi l'heure et le rayon du jour !



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