Laurent Albarracin : Fabrice Caravaca, La Vie.
© : Laurent Albarracin.
Mis en ligne le 5 mars 2010.
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Fabrice Caravaca
La Vie
Éditions
Les Fondeurs de briques, 2010
Les textes en prose qui forment La Vie proposent rien de moins que de
jeter les bases dĠune nouvelle fraternité, fraternité entre les hommes et fraternité
entre les hommes et le monde. Par lĠinvocation dĠun nous conquérant et serein, ils affirment lĠen-avant dĠune parole
collective et réconciliatrice. Des phrases comme « nous allons changer le monde » ou « nous sommes du parti des accolades » pourraient prêter à
sourire et ne résisteraient pas deux secondes à une tournure dĠesprit encline à
lĠironie. Elles nĠen sont pas moins porteuses dĠune espérance poétique (lĠamour
est à réinventer) dont Caravaca se fait ici le héraut
sans vergogne. Elles troublent surtout en nous la prévention habituelle et
mauvaise que nous avons contre ceux qui se placent du côté de la joie. Assumer
celle-ci est la défendre par son propre argument, en quelque sorte. CĠest la
méthode quĠemploie lĠauteur de ce livre, et sĠil est vrai que se dire en chemin
c'est déjà le parcourir à moitié, on ne pourra que le féliciter dĠun tel
enthousiasme. LĠaffirmation répétée du bonheur à venir finit par le faire
entrevoir dans cette affirmation même. Il y a dans ce chant du réenchantement du monde une cadence passionnée, un retour extatique
voire magique et donc efficace. CĠest le propre de lĠexaltation et de lĠivresse
lyrique que dĠemporter la réalité plutôt que de buter contre. La recherche du
salut par son affirmation ici-bas est une voie forcément couronnée de succès. Encore
faut-il posséder un élan naturel vers le monde et la vie. Manifestement ce
nĠest pas ce qui manque à Fabrice Caravaca, de même
que ne lui font pas défaut la connaissance de cet élan, ni lĠaudace, ni la
volonté dĠen découdre. Car il y a bien une guerre à mener, mais avec les armes
magnifiques de la pacification, si lĠon peut le dire ainsi. Poète néo-lyrique,
sorte de révolutionnaire mystique, on est avec lui étrangement quelque part entre
Antoine Volodine et François Augiéras,
à une frontière où le souci politique et le sentiment cosmique sĠabolissent en
quelque chose qui serait précisément la poésie.
Laurent Albarracin
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