Sur l'énigme d'un certain silence, périlleuse et pour ainsi
dire vidée d'avance de ce qui n'est pas absolument elle-même, Max Picard
(1888-1965) publie en 1948 Die Welt des Schweigens (Le Monde du silence, trad. française,
PUF, 1954, rééd. La Baconnière, 279 pages, 2019).
Dans les premières pages de ce livre, l'auteur a jeté
toutes ses forces et dévoilé tout son jeu.
Nous lecteur : nous en tenir pour l'instant à cette
Introduction, résister à toute échappatoire du côté de ce qu'on a lu ou de noms
qui viendraient à l'esprit — d'ailleurs ils ne viennent pas à l'esprit.
Tenir pour certain que, de notre part, tout soi-disant secours extérieur trahirait
ce qui se doit au projet de l'auteur.
Au premier moment du livre
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On lit la brève Introduction du livre (p. 21-22), même pas une page et
demie. Tout de suite, en même temps que le silence, surgit un répondant au silence, qui va déterminer le
champ complet d'une énigme :
Assurément, le
silence commence là où s'arrête la parole. Mais il ne commence pas parce que la parole s'arrête. Il se
manifeste alors seulement.
[…]
Le silence fait partie de la structure
fondamentale de l'homme.
Le lecteur ne doit [pas] cependant être
amené par ce livre à une « vision du monde à partir du
silence » ; il ne dot pas être amené non plus à faire peu de cas de
la parole. L'homme est homme par la parole premièrement, et non par le silence.
La parole a la suprématie sur le silence.
Mais la parole
s'abîme dès qu'elle a perdu tout rapport avec le silence. C'est pourquoi il
importe que le monde du silence, aujourd'hui recouvert, soit à nouveau rendu
manifeste — non pour le silence mais pour la parole.
Voilà, de manière abrupte, le programme du livre qui
s'annonce : une enquête sur « le monde du silence », conduite au
moyen d'une dialectique permanente à deux termes (le silence et la parole), d'une dialectique
critique du monde réel contemporain destinée à
rendre au silence, et par là à la parole, leurs pleines dimension et valeur.
Ce moment du livre a valeur stratégique. Il se porte à une
hauteur de vues dans la densité et dans la fermeté d'un style, c'est-à-dire dans
l'économie de quelques alinéas à phrases puissantes. Ainsi, au premier mot, face à ce
silence-monde, la parole en tant que le propre de l'homme se fait immédiatement écriture, en
imposant un vis-à-vis au silence : après chaque aphorisme et
avant chacun, le silence. Voilà ce qui nous frappe dans cette page.
Heureusement, dans la présente édition, deux notes de
Jean-Luc Egger viennent éclairer ces déclarations.
L'une nous informe que « l'expression
allemande Weltanschauung des Schweigens placée entre guillemets » par Picard, n'est
pas la citation de quelque auteur en référence ou à l'appui de l'Introduction mais
une précaution stratégique. Elle veut, écrit Egger,
« prévenir une mésentente de la visée de l'ouvrage » qui surviendrait
« par la proximité et le possible glissement de Welt, « le monde », à Weltanschauung,
« la vision du monde ». Bref, Picard écarte la notion « générale
et vague » de Weltanschauung, comme
impropre à décrire le monde du silence qu'il envisage.
L'autre note rappelle en effet les deux termes de l'allemand
pour désigner le silence. Stille marque le silence des choses qui ne parlent pas, le
calme et la tranquillité qu'elles tirent de leur absence de parole et,
peut-être bien aussi le fait qu'elles nous en imposent, à nous qui parlons :
« La présence de Schweigen, aussi bien dans le titre que dans la
suite du propos, n'est pas un fait secondaire ; elle manifeste l'orientation
prise par la pensée de Picard, où le silence apparaît à la fois antérieur,
opposé, mais aussi connaturel à la parole. »
C'est l'avantage, le génie et la beauté des langues comme
l'allemand et le grec dont la morphologie peut substantiver les infinitifs et
les participes des verbes à tous leurs temps, c'est-à-dire leur faire porter de manière
adéquate la charge de l'agir humain et de ses modalités : ainsi dans la
locution « le silence », das Schweigen, qui signifie « se taire »,
« être silencieux », c'est-à-dire « ne pas parler ». Ne pas
parler, par opposition à la parole humaine, tel est le trait essentiel de ce
silence-là.
C'est, entre autres, l'apport de l'édition de la Baconnière et son utilité immédiate pour qui se laisse
surprendre et frapper par le caractère altier et souverain du style de Max Picard.
En 1948, après les fracas de ses destructions infligées et
subies, l'Allemagne n'en est plus à sa récente Weltanschauung impériale ni
à aucune Weltanschauung. Plus de système en
forme ni de parole tonitruante…
Dès cette Introduction et quand vont venir les chapitres du
livre, chacun de quelques pages et en nombre indéterminé, la parole est celle
de l'aphorisme, brève et solide, mais non autoritaire — ou plutôt tirant son
autorité du silence.
Deuxième pas dans le livre
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Dans le premier de ces chapitres, il suffira d'abord à
l'auteur de procurer une sorte de première vue sur le silence, appelée « L'aspect
du silence ». Envisageant le monde du silence au gré d'une décision
qu'autorise son Introduction, l'écrivain de ce monde en assure une première approche,
en se portant lui-même au point de vue unique, nécessairement imaginaire, qui
convienne au monde du silence, pour énoncer, entre autres aphorismes, ceux-ci :
Le silence n'est rien de négatif, il n'est pas
le simple fait de ne pas parler, il est quelque chose de positif, il est par
soi-même un monde.
[…]
Quand le silence est là, il semble qu'il
n'y ait jamais rien eu d'autre, qu'il n'y ait toujours eu que lui.
Là où est le silence, l'homme est
regardé par le silence ; il regarde l'homme plus que l'homme ne regarde le
silence. L'homme ne scrute pas le silence, mais le silence scrute l'homme.
[…]
Le silence a tout en soi, il n'attend
rien ; il est toujours entièrement là et remplit toujours l'espace où il
apparaît.
[…]
Le silence est
aujourd'hui l'unique phénomène qui est « sans utilité ». Il n'a pas
de place dans le monde l'utile contemporain ; il n'est rien que là, il semble n'avoir pas d'autre fin,
on ne peut l'exploiter. (p. 23-24)
Tel est l'être du silence : consistant et omniprésent, sujet attentif
à l'homme et présent à lui, comme puissance ironique. Pratique humaine, spécifique,
au regard du silence « le se taire » et « le parler »
mettent l'homme en jeu, en cause et aux prises avec lui-même.
Dans cette séquence d'aphorismes ordonnée en trois mouvements
I, II, III, qui forment en tout trois pages, seul paraît un nom, celui
d'Hölderlin, lequel, à la fois, introduit le thème de la poésie et celui d'une
dimension de sacré intime à l'homme lui-même. Cette référence permet cette
affirmation :
Ici, dans le silence, se trouve la nature
sauvage sacrée, car la nature sauvage
sacrée et l'édification divine font un.
Phénoménologie du silence, si l'on veut, puisque cette évocation
demande l'absolutisation d'une conscience qui se mette en prise avec l'absolu
du silence et produise une parole absolue, dans la poétique qui convienne,
celle justement de cet aphorisme et de tous les autres.
Il ne reste plus au lecteur, guidé par ces principes, qu'à
lire la totalité de ces courts chapitres qui vont parcourir, non numérotés et
selon divers points de vue, le monde du silence…
Les chapitres, tels qu'ils se présentent un par un
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Personne ne peut s'immiscer dans le travail réel d'un livre
et aucun grand livre, de fait, ne s'écrit selon un trajet linéaire, la plume à
la main et de improviso, et
pas plus que les autres ce livre Le Monde
du silence. Il y a là un effort de pensée dont bien des moments demeurent
cachés ou au moins énigmatiques, même à l'auteur.
Renonçons à désespérer des documents que nous n'avons pas et
n'aurons probablement jamais, abandonnons toute tentative d'histoire ou de
généalogie de ce livre. Sur ce thème, demandons plutôt son avis à un écrivain
qui s'y connaissait, même s'il parlait plutôt des sujets de roman. Demandons
son expérience aux métaphores naturalistes de Gracq :
Un vrai sujet a
une pente secrète ; si vous cherchez à le préciser, et même sur quelque
détail secondaire, il ne vous laisse pas plus dans l'embarras qu'un relief
vigoureux ne laisse dans le doute la goutte d'eau de pluie qui tombe sur lui et
qui l'interroge sur la décision à prendre. Il tient en quelques lignes, il se
laisse embrasser d'un coup d'œil, et il a réponse à tout.
Un vrai sujet ne
laisse étranger à sa donnée aucun règne et aucun ordre, ni humain, ni
terrestre. (Julien Gracq, En lisant en
écrivant)
Tel était peut-être bien le sujet du Monde du silence : la formule compacte d'un univers, tout
entier à comprendre selon la seule donnée de son silence, en tant qu'opposé à la
parole.
On ne saurait dominer ce sujet, fût-ce par et dans le
discours de pensée le plus rigoureux qui soit — cela justement parce que c'est
un sujet au sens grammatical et
ontologique, et non pas un objet. Cet univers-là, on ne saurait non plus le
traverser ou le percer à jour par l'un de ces chemins rectilignes et résolus
dont parle Descartes, ni non plus en faire le tour. Ces images-là seraient
trompeuses, non pas parce que ce sont des métaphores mais parce qu'elles ne
conviennent pas au sujet dont il est question : elles ne touchent pas
juste.
Mais il y a une autre métaphore, que suggérait le premier
chapitre du livre « L'aspect du silence », celle d'un certain
abord : quel aspect peut revêtir ce monde du silence, globalement, au
regard d'une conscience qui voudrait en prendre connaissance ?
La question qui se posait alors immédiatement était celle
d'un styke et non celle d'une technique : du « monde du
silence », l'aspect que prendra la conscience de ce silence ne sera pas
celui d'une vision à décrire mais celui d'un silence exclusif de toute autre qualité.
La réponse était déjà : cet aspect du silence, il faut l'envisager par le
moyen d'une certaine parole, aphoristique, et non par le moyen d'un récit ni d'un
discours de description.
Cette métaphore-là d'un monde évoqué selon son
aspect comprend aussi une conscience qui n'hésiterait pas à envisager la forêt
du silence, et même qui trouverait
plaisir et sens à l'évoquer, confiante qu'elle serait dans la nature
même du monde du silence et qu'il suffit de regarder ses paysages de n'importe
quel point de vue pour le comprendre tout entier, et pour le parler, et pour
l'écrire. À regarder pour ainsi dire naïvement « le monde du silence », on ne saurait errer.
L'aspect, les aspects, l'aspection
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L'aspect comme modalité grammaticale, entre autres en tant
qu'il note l'action ou l'état duratif ou ponctuel exprimés par le verbe, est décrit
dans la langue des linguistes.
Mais aussi il s'écrit en langue notariale : on dit d'une maison qu'elle
est aspectée au midi. Dans la perspective et la langue de Picard, ce terme déterminera
une obligation, celle de s'aspecter soi-même au silence, cela afin,
réciproquement, d'aspecter le silence à ses propres dispositions : à son
étonnement à l'égard de ce silence, à ses questions, à ses demandes.
Se poser donc soi-même en demandeur de sens. Aimer ce
silence, sans autre condition que celle de se disposer à lui demander son
sens et sa propre intentionnalité.
Et disposer son lecteur à cette même disposition.
Ici encore une sorte de phénoménologie pourrait trouver sa
place, comme méthode — si l'on voulait bien transposer la formule canonique de
la description phénoménologique en celle-ci : la compréhension du « monde
du silence » est la conscience-du-monde-du-silence.
Ces aspects sont nombreux et même en nombre indéterminé et
imprévisible : notamment l'auteur ne saurait prévoir ceux que son lecteur
connaît déjà, qu'il pratique lui-même et préférera.
Le livre adoptera donc une espèce d'ordre non
exhaustif : varié et néanmoins organisé, selon des parties non titrées et
non numérotées.
D'abord, « Le phénomène originaire du silence »,
« La naissance de la parole à partir du silence », « Silence, parole
et vérité », « Le silence dans la parole », « L'homme entre
silence et parole ». Ce groupement implicite développe les aspects énoncés
dès le premier abord du livre.
Ensuite, des pratiques humaines du silence et de la parole,
qui évoquent des ordres divers de l'expérience humaine, comme, entre autres,
« Le démoniaque dans le silence et dans la parole », « Parole et
geste », « Les langues anciennes », « Amour et
silence », « Visage humain et silence », « L'enfant, le
vieillard et le silence », « Le paysan et le silence », « Poésie
et silence », « Arts plastiques
et silence », « La radio », « Le silence et la foi »…
À chaque chapitre, des commentaires, brefs, dans la même langue
aphoristique, à la fois précise, incisive et allusive.
⇒ Arrêtons-nous sur le chapitre « Poésie et silence,
exemples » (p. 161-171).
Dix pages d'occurrences à peine commentées, qui
vont d'un poème de Novalis, au conte (un conte de Grimm) ; aux
proverbes ; à la tragédie antique (« Ce monde sans utilité a besoin
de l'arrière-plan du silence qui est
lui-même la plus grande existence sans utilité ») ; aux présocratiques (« Les paroles ne se sentent
pas encore chez elles dans le monde de la parole ; elles ne se sentent
encore nulle part chez elles ») ; à Hérodote (« Les choses et
les événements sont là et leur présence
est déjà récit. […] Ce n'est possible que là où la parole se porte comme pour
la première fois vers la chose ou l'événement à qui elle convient et, pour ce
motif, elle s'y attache si fermement que parole et chose font un ») ;
à Shakespeare (« Les paroles et les scènes sont là, si fraîches qu'on
dirait qu'elles viennent de jaillir dans le langage […] ») ; à Jean-Paul ;
à Hölderlin ; à un poème de Goethe…
Le poème de Novalis est un chant lancinant dans lequel
« les peuples à l'état de nature » répètent
en refrain : « Où mon âme s'en est-elle donc allée ?/
Rentre à la maison, rentre à la maison, »
Parmi les quelques commentaires
de Picard :
Il y a une grande mélancolie dans ces
chants des peuples à l'état de nature ; c'est la mélancolie de l'homme qui
connaît une double angoisse : angoisse d'avoir été expulsé du silence par
la parole et angoisse d'être jeté à nouveau dans le silence, de perdre à
nouveau la parole. Entre ces deux angoisses infinies comme le silence et
infinies comme la parole, s'étend, infinie, la mélancolie du chant.
On ne saurait mieux mettre en œuvre les thèmes que nous
connaissons déjà — le jeu de la parole et du silence et le fait des
deux silences, de nature opposée, cela dans une disposition lyrique qui tente
de conjurer par le rythme obsessionnel d'une parole chantée une perte :
entre le silence du monde originel et celui du silence dégradé et hostile dans
lequel ces peuples ont été précipités. Le poème de Novalis est plus puissant
que les discours désespérés de Rousseau, car ce n'est pas un discours.
⇒ Puis sur « Maladie, mort et silence » (p.
227-231) :
Autour de la
maladie, il y a aujourd'hui, dans le monde du bruit, un silence que tous les
discours justes et fallacieux des médecins ne peuvent expulser. Il semble que
le silence, chassé de partout, soit allé se cacher chez les malades : il
est chez eux comme en des catacombes.
Souvent, quand un
malade gît silencieux, ce malade semble être seulement le lieu où le silence
s'est établi ; la maladie est venue, le silence l'a suivie […]
Ici comme dans tous ces chapitres, on est frappé de voir
que, à tous les règnes de la vie et des productions humaines, les deux concepts
de Picard conviennent, comme aussi son écriture aphoristique :
Aujourd'hui, la
mort n'est plus un monde à part, elle est seulement reste ultime de vie, vie
usée ; même le silence ne lui appartient plus ; le silence n'est plus
en elle qu'un prêt, qu'un prêt de pitié.
Mais soudain, la
mort est de nouveau là, formant tout un monde ; la vie n'apparaît que
comme le glacis de ce monde […]. Le silence, expulsé de la vie et de la mort,
arrive par la rigidité que la terreur fait tomber sur l'homme.
(Permettons-nous une réflexion en marge. Le silence qui affecte
la surdité devenue totale et qui n'est pas sans troubler gravement la parole du
sourd est, lui, effrayant. Il n'est ni celui qui est connaturel à la parole ni
celui du monde réel. C'est une expérience inhumaine. Le sourd a peur de son
silence et il fait peur à ceux qui parlent et entendent. Cette figure,
apparemment humaine où ne s'inscrit aucun signe visible d'infirmité mais qui ne
comprend rien et répond à côté par une espèce d'aboiement, ne saurait recevoir
des humains ni commisération ni même de pitié humaine.)
⇒ Et puis sur le chapitre « Amour et silence » (p.
103-106) :
Dans le silence, passé, présent et avenir
sont ramassés en une même unité. Aussi les amants sont-ils enlevés au
déroulement du temps. Rien ne s'est encore produit, tout peut advenir ; ce
qui sera est déjà là, ce qui fut est là comme en un éternel présent. Le temps,
pour les amants s'arrête. Le don de pressentiment et de clairvoyance que possèdent les amants est en rapport avec
le fait que, dans l'amour, passé, présent et avenir sont un.
Les phrases se pressent, toutes reprenant diversement la
même chose, c'est-à-dire le même mystère immobile de l'amour. Glissant l'une vers
l'autre, elles répondent à l'un des défis fondamentaux qui se proposent à
l'écrire, de se déployer à la fois dans le temps de la diction et dans
l'absence de temps de la pensée.
Celles-ci annoncent de loin et très allusivement un certain
thème, celui de la mort :
Cette plénitude de silence en l'amour
suffit jusqu‘au silence qui accompagne la mort. Amour et mort sont un. Toute
pensée, toute action en l'amour s'étendent déjà, grâce au silence, jusqu'à la
mort ; mais le miracle de l'amour est que là où pourrait être la mort,
apparaît l'aimé.
De même aussi ces chapitres se répondent à travers le jeu
des mêmes concepts, de diverses images et du mode aphoristique que ce jeu
autorise.
⇒ Enfin, remontons au chapitre « Image et silence »,
qui vaut poétique en général, mais aussi pour le livre lui-même (p.
99-102) :
L'image est silencieuse et, dans son silence,
elle dit quelque chose. Le silence est nettement présent dans l'image, mais,
tout près de ce silence, il y a la parole. L'image est silence qui parle.
L'image est comme une station sur le chemin qui mène du silence à la parole.
L'image est à la frontière entre le silence et la parole ; en ces confins,
silence et parole sont face à face, mais la tension est résolue par la beauté.
Cependant,
L'homme a aujourd'hui en face de soi trop
de choses, aussi un trop grand nombre d'images se presse-t-il dans son
âme ; il n'y a plus dans l'âme de quiétude silencieuse, mais seulement une
inquiétude silencieuse. […} Le silence a été expulsé du monde d'aujourd'hui.
[…]