Une autre étude sur le même poème (24 janvier 2009)
MICRO-ÉTUDES DANS HUGO
Mugitusque boum
Mugissement des bufs, au temps du doux Virgile, Ainsi, vous parliez, voix, grandes voix solennelles ; Mugitusque boum, Les Contemplations, V, xvii.
Du français au latin, de Hugo à Virgile et à la Bible, de poème en poème, nous remontons le feuilleté des temps, et à chaque moment nous sommes ainsi, tous et chacun, dans le même Temps : celui de l'éternité. De « Booz endormi » aux Géorgiques et de Tityre à nous-mêmes, à l'ombre du même hêtre et suivant le même rythme des travaux et des jours, aux sons des campagnes et des vers, Hugo fait le joint. Comme aujourd'hui le soir/ Mais que peut de nos jours la diction de l'alexandrin selon Hugo une dernière fois impérieuse, disait Mallarmé et le rappel qu'elle intimait à l'hexamètre et aux mesures de la Bible ? Qui comme Hugo pourrait désormais plier notre langue aux rythmes anciens ? Et, depuis nos années cinquante, précédée par le grand vers, l'agriculture européenne n'est-elle pas sortie du néolithique ? Cependant nous appartenons encore au monde des tout premiers cultivateurs et de leurs prophètes, puisque, continuant leurs efforts dans les rythmes de nos champs d'Occident, nous remplissons humainement leur vu de vagues de blé moutonnant en masses impeccables jusqu'à l'horizon, à eux que nourrissaient à peine, dans les bonnes années, quelques épis pointant dans des cailloux au milieu de l'ivraie. Et les mutations que nous imposerons aux gènes des végétaux ne seront pas plus décisifs le veuillent les dieux ! que celles qui firent, au long des millénaires, d'une herbe folle de Mésopotamie, la famille nombreuse et heureusement perfectionnable des céréales.
Pierre Campion
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