Pierre Campion Extrait de Se rafraîchir à La Fontaine. L'animalité de l'homme dans les Fables, Rennes, éd. Ennoïa, 2004, pp. 31-32. © : Pierre Campion et les éd. Ennoïa.
En 1967, Ponge mettait à feu Le Savon : « Voilà donc ce livre bouclé ; notre toupie lancée ; notre SAVON en orbite. » Considérons nous aussi les fables de La Fontaine comme autant d'objets lyriques parfaitement identifiés, lancés dans notre atmosphère entre 1665 et 1694 et qui continuent à se signaler à l'attention de nos lectures. Ces objets en relaient certains autres, marqués Phèdre ou Ésope, Gabrias ou Pilpay, lesquels répètent selon leur code des sources anonymes et encore plus éloignées de nous. Les uns et les autres nous apportent des nouvelles de nos semblables : ils se reposaient sous le couvert des hêtres et se chauffaient au bois des chênes, craignaient les loups et chassaient les souris par leurs chats ; ils étaient gais ou tristes, inconséquents et obstinés, passionnés — une humanité comme la nôtre, l'une et l'autre appartenant au spectre de la vie, l'une et l'autre périssables. (Ainsi de ces concerts soigneusement enregistrés il y a maintenant des décennies : nos têtes de lecture nous délivrent des nuances que beaucoup de leurs auditeurs et les ingénieurs autrefois penchés sur leurs bandes n'avaient jamais entendues. Elles y étaient pourtant.) Bon de commande, à remplir et envoyer. |