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Annick Le Chanu : Enseigner la littérature à des adultes.

Annick Le Chanu est professeur agrégé émérite de Lettres classiques. Elle a enseigné au lycée Renan à Saint-Brieuc, notamment en classe de Lettres supérieures.

Elle assure un cours de littérature à l'Université du Temps libre (UTL) de Saint-Brieuc, organisme qu'elle préside par ailleurs.
Fédérées entre elles et maillant certaines régions, les UTL accueillent principalement des personnes en retraite ou à l'âge de la retraite, un public demandeur de culture sous des formes très diverses.

Texte mis en ligne le 13 mars 2008.

© : Annick Le Chanu.


Enseigner la littérature à des adultes

Club de lecture et université du Temps libre

Je puis rappeler les différentes actions que je mène depuis des années en direction des adultes, mais je dois dÔabord en marquer les limites. Aucune de ces actions ne vise à l'obtention d'un diplôme. Il s'agit avant tout d'une ouverture à la littérature qui cherche à associer le plaisir de la découverte et la joie de mieux comprendre.

Aussi les méthodes que j'utilise sont-elles surtout pragmatiques. J'anime un club de lecture dans une bibliothèque depuis environ trente ans. À l'origine, ce club avait pour mission de permettre à des lecteurs d'échanger leurs impressions sur tel ou tel ouvrage, roman le plus souvent, mais aussi parfois recueil de poèmes ou œuvre dramatique programmée au théâtre local.

Mais très rapidement — en moins de deux ans — le nombre de lecteurs est devenu tel que l'attente du public a radicalement changé. Les lecteurs ne viennent plus pour parler eux-mêmes, mais pour entendre en sus de la présentation, une analyse de l'œuvre choisie. Assurément je n'entre pas dans des détails techniques, je n'utilise qu'avec parcimonie le vocabulaire de la linguistique ou de la rhétorique, j'insiste sur le fait que mon analyse est subjective et n'épuise nullement les facettes de l'œuvre, et surtout j'invite les lecteurs à exprimer leurs points de vue. Mais malgré de nombreuses sollicitations, la discussion qui s'ensuit ne dépasse guère le quart d'heure, avec des remarques fort judicieuses le plus souvent, inattendues parfois.

Des satisfactions cependant : d'abord beaucoup de lecteurs affirment avoir une lecture plus attentive, plus réfléchie, ne se contentant plus d'un Ç j'aime È ou Ç je n'aime pas È, mais s'interrogeant sur la composition, les intentions de l'auteur et les moyens mis en œuvre pour les réaliser. Ils apprécient aussi de découvrir des textes et des auteurs qu'ils ignoraient. Enfin il arrive, trop rarement, mais il arrive que des lecteurs acceptent de présenter eux-mêmes tel ouvrage qu'ils ont apprécié.

 

Le cours de littérature que j'assure depuis vingt ans au sein de l'Université du Temps libre a un fonctionnement différent. Les étudiants s'inscrivent pour l'année et nous suivons le programme choisi à la fin de l'année précédente. Ici non plus pas de diplôme en vue, mais la recherche d'un approfondissement des connaissances, du contact avec des auteurs que leur lointaine scolarité n'a pu leur faire connaître ou qu'ils ont abordés dans un esprit bien différent.

Le programme est établi autour d'un thème, d'une période, d'un mouvement littéraire ou autre. À titre d'exemples, voici quelques sujets traités les années dernières :

á Peinture et littérature

á L'autobiographie

á Le romantisme

á Le mythe au théâtre de l'Antiquité au XXe siècle.

á L'évolution du roman du début du XIXe siècle à nos jours, etc., etc.

Nous avons même élargi notre horizon en étudiant sur une année les chefs-d'œuvre de la littérature européenne. Cette année nous traitons de la Seconde Guerre mondiale dans la littérature.

Évidemment les étudiants ne sont soumis à aucune obligation ni d'assiduité, ni de comptes rendus ni de quelconque devoir. À la fin du cours, les questions souvent pertinentes des étudiants ouvrent des perspectives différentes et d'autant plus intéressantes.

L'attention des étudiants, leur désir d'apprendre, leur volonté de comprendre (même des œuvres difficiles ne les rebutent pas) sont si flagrants que le cours est nécessairement d'un niveau aussi élevé que possible. Sans vocabulaire pédantesque, sans termes abscons, il sÔagit de présenter une analyse sérieuse du contexte historique et littéraire, du projet de lÔauteur, de ses thèmes récurrents, de la structure de lÔœuvre, etc.

Les résultats obtenus sont assurément intangibles, mais la fidélité des étudiants qui suivent ces programmes depuis des années montre qu'ils répondent dans leur forme et dans leur contenu à leur attente.

Annick Le Chanu

 

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