Au sein de la séquence pédagogique créée par Pascal Le Bert sur la justice et l'emprisonnement, des él¸ves ont écrit des articles faisant compte rendu de livres ayant trait à l'objet du cours. On trouvera ci-dessous l'un de ces articles.
Pascal Le Bert est professeur de Lettres au lycée Charles de Gaulle à Vannes.
Nous le remercions de nous permettre de publier cet article.
Jean-Marie Rouart,
écrivain, membre de l'Académie française et journaliste au Figaro a publié, en
1994, Omar, la construction d'un coupable. Indigné par la
condamnation subie par Omar Raddad, il nous propose, à travers son ouvrage, une
relecture du dossier d'accusation : le sentiment d'injustice est patent.
C'est pourquoi, dans le combat pour la reconnaissance de l'innocence d'Omar
Raddad, la rédaction de cet ouvrage s'imposait comme une nécessité.
Omar
Raddad, un jeune marocain, est jardinier : certains dimanches, il se rend
chez Ghislaine Marchal pour exercer des travaux dans la propriété. Ainsi, après
être intervenu chez madame Marchal, Omar part, à l'occasion de la fête de l'Aïd-el-kébir, à Toulon rejoindre sa femme et son
fils. Mais le lendemain de son arrivée, les gendarmes l'arrêtent et l'accusent
d'avoir assassiné sa patronne, Ghislaine Marchal.
Une
inscription en lettres de sang, « Omar m'a tuer », trouvée près du
cadavre sur la porte de la cave de la maison ont mis les enquêteurs sur la
trace d'Omar. Au poste de police, il doit donc expliquer en détail ce qu'il a
fait le 23 juin, jour supposé du meurtre.
Les difficultés financières d'Omar seraient le
mobile de l'assassinat, selon le juge ; il pense qu'après le refus de sa patronne de lui faire une
avance de salaire, Omar, pris d'un brusque accès de folie meurtrière, l'aurait
poignardée.
De
nombreux examens vont être effectués : tout d'abord, pour savoir si Madame Marchal
était réellement en état d'écrire avec son sang le message retrouvé, et si celui-ci a bien été écrit de sa
main. Puis, les enquêteurs vont examiner les affaires d'Omar afin de voir si elles n'ont pas conservé
des poussières de la cave ou des traces de sang.
Finalement, beaucoup de doutes
surgissent : aucune tache de sang n'a été retrouvée sur les affaires
d'Omar. Ensuite, les médecins légistes ont d'abord estimé la date du décès au
24 juin entre 11h et 14h, puis prétextant une faute de frappe, ont rectifié
leur rapport et ont inscrit la date du 23 juin… De plus, on n'a aucune
certitude sur l'auteur de l'inscription : quand on a commencé à se poser des questions, on n'a pas pu
procéder à des vérifications sur le corps de Ghislaine Marchal car il a été (trop) rapidement
incinéré. Ce qui est apparu étrange à beaucoup, sachant qu'elle avait acheté un
caveau… Tous ces aspects du dossier ajoutés au manque de curiosité des
gendarmes et des juges d'instruction, et même à de mystérieuses disparitions de
pièces à conviction font douter de la culpabilité d'Omar Raddad, au point de
faire planer sur cette affaire le spectre de l'erreur judiciaire.
Finalement,
devant l'émotion soulevée dans l'opinion publique par les incertitudes du
dossier, et après que le roi du
Maroc, Hassan II, lui-même, est intervenu, le président Jacques Chirac accorde en 1998 une grâce
présidentielle à Omar Raddad, après 7 ans d'emprisonnement. Néanmoins, cela
n'efface pas sa condamnation à dix-huit ans de réclusion criminelle. Avec ses
avocats, Omar dépose donc en janvier 1999 une requête en révision, espérant
ainsi obtenir un nouveau procès, seul susceptible de le réhabiliter
totalement : « Je ne vous demande pas
grand chose, je veux un deuxième procès, toute la France le demande. Je sais
que je pourrais être condamné à perpétuité, mais c'est moi qui prends le
risque. »
A. G.
Lycée Charles de Gaulle de Vannes, mars 2004.
En février 2004, Omar Raddad n'avait toujours pas
obtenu de réponse de la Chancellerie…
Omar,
la construction d'un coupable , de Jean-Marie Rouart – Éditions de
Fallois, 199 pages, 15 €.