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Denis Seznec raconte Ç L'affaire Seznec È à des lycéens vannetais

Quatre-vingts ans de combat acharné pour obtenir la réhabilitation de son grand-père

Ce jeudi 12 novembre 2004, Denis Seznec est venu faire partager aux premières ES1 et ES 2 du lycée Charles de Gaulle de Vannes son combat pour la reconnaissance de l'innocence de son grand-père, Guillaume Seznec. Accusé du meurtre de Pierre Quemeneur, conseiller général du Finistère, Guillaume Seznec avait été condamné en 1925 au bannissement à vie.

L'auditoire a été conquis par le discours captivant et chargé d'émotion du petit-fils Seznec.

Une nouvelle fois, pour les lycéens, Denis Seznec a rappelé l'origine du drame qui a frappé sa famille.

Enquête et procès expéditifs

En mai 1923, Guillaume Seznec et son ami Pierre Quemeneur, conseiller général du Finistère, se rendent à Paris pour y négocier un contrat de vente de voitures américaines : un trafic de Cadillac. Celles-ci avaient été laissées par les troupes américaines après la guerre de 1914-1918.

Seznec revient seul à Rennes. Quemeneur, lui, a disparu. Ils ont été vus tous deux pour la dernière fois près de la gare d'Houdan. Seznec est alors accusé de meurtre. L'enquête est rondement menée par l'inspecteur Bony et ses hommes.

Et, le 4 novembre 1925, selon une logique implacable, Guillaume Seznec est condamné par la cour d'assises de Quimper au bagne à perpétuité pour le meurtre de son ami, malgré les doutes du dossier et l'absence du corps de la victime. Ç Comment peut-on condamner quelqu'un sans savoir s'il y a eu crime ? È, demande Denis Seznec, stigmatisant le fonctionnement de la justice française de l'époque mais, aussi, les décisions des magistrats qui se sont penchés successivement sur ce dossier, sans jamais ne rien trouver à redire.

Ç On peut se réjouir car, en France, nous avons la meilleure justice au monde : elle ne se trompe jamais ! È, ironise alors Denis Seznec.

Déporté puis gracié

Finalement, Guillaume Seznec est gracié en 1947 par le Général de Gaulle après vingt-quatre longues années au bagne… C'est un véritable miracle qu'il soit sorti vivant de cet enfer lorsque l'on sait que la durée de vie moyenne y était de quatre ans. Ç Mon grand-père m'en parlait toujours comme d'un paradis, avec les oiseaux exotiques, les cocotiers… È

La mort mystérieuse d'un grand-père aimé

Denis Seznec et son grand-père étaient très proches. C'est pourquoi il a été très choqué d'apprendre sa mort en 1958, à 12 ans, soit cinq ans après l'accident mortel dont a été victime son grand-père en 1953. En effet, sa mère ne sachant pas comment lui annoncer la terrible nouvelle, a préféré lui mentir. Elle est allée jusqu'à répondre aux lettres que le jeune homme adressait à son grand-père, se faisant passer pour celui-ci…

À ce terrible secret de famille s'ajoute celui, jamais élucidé, concernant Les circonstances bien mystérieuses  de l'accident : la camionnette qui a renversé Guillaume Seznec a pris la fuite, s'est volatilisée et jamais on n'en a retrouvé la moindre trace…

Le combat d'une vie

Ç N'avez-vous jamais songé à renoncer ? Avez-vous déjà pensé que votre grand-père pouvait être coupable ? È, ont interrogé des élèves.

Denis Seznec avoue avoir douté un moment de l'innocence de son grand-père, mais devant l'absurdité des preuves retenues contre lui, et devant ses propres découvertes, ses doutes se sont dissipés.

Quant à renoncer, Denis Seznec répond qu'il lui est souvent arrivé de se décourager face à la surdité de la justice…

Ç Mais ce combat de l'innocence poursuivi par trois générations est trop beau pour que j'abandonne. Ce combat n'est pas le mien, c'est celui de toute une famille et je sais que je suis le dernier… È

La famille martyre, ruinée par cette affaire est aujourd'hui persuadée que la justice, à travers la Ç commission de révision È, acceptera enfin de reconnaître son erreur et réhabilitera Guillaume Seznec ; celui-ci pourrait alors devenir le Ç nouveau Dreyfus È.

Le verdict est attendu pour le 24 janvier prochain : Ç Mais quel que soit le résultat, j'ai déjà remporté une victoire morale : plus personne ne croit aujourd'hui mon grand-père coupable. Seule la justice se fait prier pour le reconnaître mais je pense voir bientôt la fin de notre combat… È

Belle leçon d'optimisme d'un homme qui n'en a jamais manqué…

E. B.
Lycée Charles de Gaulle de Vannes,
14 novembre 2004.