Serge Meitinger : Traduction du poème de Hölderlin Andenken. Serge Meitinger est professeur à l'Université de la Réunion. Il a publié de nombreux articles et recueils de poésie. Ouvrage : Stéphane Mallarmé, Hachette, 1995. © : Serge Meitinger. Mis en ligne le 9 juin 2004. HölderlinRESSOUVENIR(ANDENKEN)Traduction de Serge MEITINGER
Le nord-est souffle, Mon préféré entre les vents, Car il promet ardente inspiration Et bonne traversée aux marins. Va donc maintenant et salue La belle Garonne, Et les jardins de Bordeaux Là-bas, où sur la rive escarpée S'éloigne le sentier, où dans le fleuve Profond tombe le ruisseau, mais au-dessus Veille aux lointains un noble couple De chênes et de peupliers argentés ;
Il m'en souvient bien encore et comme La forêt d'ormes incline Ses larges cimes sur le moulin, Dans la cour par contre pousse un figuier. Aux jours de fête vont Les femmes brunes là-même, Sur le sol de soie, Au temps de mars, Quand sont égaux nuit et jour, Et, sur de lents sentiers, Alourdies de rêves dorés, Passent de berçantes brises.
Et que l'on tende Pleine de sombre lumière, À moi, la coupe odorante Qui me donne le repos ; car doux Serait sous les ombres le somme. Il n'est pas bon De n'être animé d'aucune périssable Pensée. Mais bon Est le dialogue et de dire L'opinion du cœur, d'entendre dire beaucoup Des jours de l'amour Et des travaux qui s'accomplissent.
Mais où sont les amis ? Bellarmin Et son compagnon ? Plus d'un Craint d'aller à la source ; Et la richesse commence bien À la mer. Eux, Comme des peintres, rassemblent La beauté de la terre et ne dédaignent Ni la guerre ailée, ni D'habiter seuls, des années durant, sous Le mât défleuri, là où ne brillent à travers la nuit Les jours de fête de la ville, Avec les mélodies et la danse natales.
Mais désormais vers les Indes Les hommes s'en sont allés, Par-delà la pointe venteuse, Par-delà les vignobles, là où Descend la Dordogne, Et où, uni à la somptueuse Garonne, large comme mer s'étend le fleuve. Mais elle ôte Et rend la mémoire, la mer, Et l'amour aussi fixe attentivement des yeux, Mais ce qui demeure, les poètes le fondent.
1976-2004
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