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Au cours de l'année 2012-2013, Françoise Sérandour a conduit un travail d'écriture poétique avec les élèves-ingénieurs à l'INSA de Rennes (Institut National des Sciences Appliquées). On présente ici plusieurs traductions de poèmes, de leur langue originale en français ou inversement. Remerciements aux auteurs, à Françoise Sérandour et à l'INSA de Rennes. © Les auteurs, Françoise Sérandour et l'INSA de Rennes. Mis en ligne le 17 juillet 2013. Des poèmes et leurs traductionsDemain dès l'aube…Demain, dès l'aube, à
l'heure où blanchit la campagne, Je partirai. Vois-tu, je
sais que tu m'attends. J'irai par la forêt,
j'irai par la montagne. Je ne puis demeurer loin
de toi plus longtemps. Je marcherai les yeux
fixés sur mes pensées, Sans rien voir au dehors,
sans entendre aucun bruit, Seul inconnu, le dos
courbé, les mains croisées, Triste, et le jour pour
moi sera comme la nuit. Je ne regarderai ni l'or
du soir qui tombe, Ni les voiles au loin
descendant vers Harfleur, Et quand j'arriverai, je
mettrai sur ta tombe Un bouquet de houx vert et
de bruyère en fleur. VICTOR HUGO, Poème à sa fille Léopoldine (1856) Mañana, al albaMañana,
al alba, cuando clarea la campaña, Partiré.
Lo ves, sé que me esperas. Iré
por el bosque, iré por la montaña. Ya no
puedo vivir lejos de ti mucho tiempo. Caminaré
con los ojos firmes en mis pensamientos, Sin
ver nada más, sin escuchar ningún ruido, Solo
desconocido, el dorso encorvado, las manos cruzadas, Triste,
y el día será para mi como la noche. No
miraré ni el oro de la tarde que cae, Ni
las velas a lo lejos descendiendo hacia Harfleur, Y
cuando llegue, pondré sobre la tumba Un
ramo de acebo verde y de brezo en flor. VICTOR HUGO, poema a su hija Léopoldine (1856)
A bailarinaEsta
menina Não conhece nem dó nem ré Não conhece nem mi nem fá Não conhece nem lá nem si Roda, roda, roda, com os bracinhos no
ar Põe no cabelo uma estrela e um véu Esta menina Mas depois esquece todas as danças, CECILIA
MEIRELLES La ballerineCette fille Ne connaît ni do ni ré Ne connaît ni mi ni fa Tourne, tourne, tourne avec les petits bras dans
l'air Elle met dans les cheveux une étoile et un voile Cette fille Mais après oublie toutes les danses, Traduit
du portugais en français par Deborah Machado Ayres et
Angela De Bortoli Saggin A CasaEra uma casa
muito en graçada Não tinha teto,
não tinha nada. Ninguém podia
entrar nela, não Porque na casa
não tinha chão. Ninguém podia
dormir na rede Porque na casa
não tinha parede. Ninguém podia fazer
pipi Porque peni conão
tinhaali. Mas era feita commuito
esmero Narua dos bobos,
número zero. VINICIUS DE MORAES La Maison C'était une drôle de maison Sans toit ni rien. Personne ne pouvait y entrer, Parce qu'elle n'avait pas de sol. Personne ne pouvait dormir dans le hamac Parce qu'elle n'avait pas de mur. Personne ne pouvait faire pipi Parce qu'elle n'avait pas de vase de nuit. Mais cela a été fait avec beaucoup de soin Dans la rue des fous, numéro zéro. Traduit du portugais en français par Lucas Eduardo De Paula O Bicho“Vi ontemum bicho Naimundície do
pátio Catando comida
entre os detritos. Quando achavaal gumacoisa, Não examina va nem
cheirava: Engolia com voracidade. O bicho não era
umcão, Não era um gato, Não era um rato. O bicho, meu
Deus, era umhomem.” MANUEL BANDEIRA L'animalÇ Je vis hier un animal Dans la crasse de la cour Ramassant la nourriture dans les détritus. Quand il trouvait quelque chose, Il n'examinait ni ne sentait : Il avalait avec voracité. L'animal n'était pas un chien, N'était pas un chat, N'était pas un rat, L'animal, mon Dieu, était un homme. È Traduit du portugais en français par Lucas Eduardo De Paula Soneto de La dulce QuejaTengo miedo a perder la maravilla FEDERICO GARCIA LORCA Sonnet de la douce plainteJ'ai peur de perdre la merveille Traduction
de l'espagnol en français par Concepción Rodriguez Benavides La Canción del PirataCon diez cañones por banda, viento en popa, a toda vela, no corta el mar, sino vuela un velero bergantín. Bajel pirata que llaman, por su bravura, El Temido, en todo mar conocido del uno al otro confín. La luna en el mar riela en la lona gime el viento, y alza en blando movimiento olas de plata y azul; y va el capitán pirata, cantando alegre en la popa, Asia a un lado, al otro Europa, y allá a su frente Istambul, Navega, velero mío sin temor, que ni enemigo navío ni tormenta, ni bonanza tu rumbo a torcer alcanza, ni a sujetar tu valor. Veinte presas emos hecho Ades pecho del inglés y han rendido sus pendones cien naciones a mis pies. Que es mi barco mi tesoro, que es mi dios la libertad, mi ley, la fuerza y el viento, mi única patria, la mar. Allá; muevan feroz guerra ciegos reyes por un palmo más de tierra; que yo aquí; tengo por mío cuanto abarca el mar bravío, a quien nadie impuso leyes. Y no hay playa, sea cualquiera, ni bandera de esplendor, que no sienta mi derecho y dé pechos mi valor. Que es mi barco mi tesoro, que es mi dios la libertad, mi ley, la fuerza y el viento, mi única patria, la mar. A la voz de "Ábarco viene!" es de ver cómo vira y se previene a todo trapo a escapar; que yo soy el rey del mar, y mi furia es de temer. En las presas yo divido lo cogido por igual; sólo quiero por riqueza la belleza sin rival. Que es mi barco mi tesoro, que es mi dios la libertad, mi ley, la fuerza y el viento, mi única patria, la mar. ÁSentenciado estoy a muerte! Yo me río no me abandone la suerte, y al mismo que me condena, colgaré de alguna antena, quizá; en su propio navío. Y si caigo, ¿qué es la vida? Por perdida ya la di, cuando el yugo del esclavo, como un bravo, sacudí. Que es mi barco mi tesoro, que es mi dios la libertad, mi ley, la fuerza y el viento, mi única patria, la mar. Son mi música mejor aquilones, el estrépito y temblor de los cables sacudidos, del negro mar los bramidos y el rugir de mis cañones. Y del trueno al son violento, y del viento al rebramar, yo me duermo sosegado, arrullado por el mar. Que es mi barco mi tesoro, que es mi dios la libertad, mi ley, la fuerza y el viento, mi única patria, la mar. JOSE DE ESPRONCEDA La chanson du pirateAvec dix
canons de chaque côté Vent en
poupe à toute voile Ne coupe
pas la mer mais vole voilier
brigantin. Le
bateau pirate, nommé Pour sa
bravoure Ç Le Redouté È, Sur
toute la mer il est connu De l'un
à l'autre confin. Dans la
mer la lune brille Dans la
voile gémit le vent, Et la
soulève d'un doux mouvement de vagues Argentées
et bleues ; Et le
capitaine pirate regarde, Joyeux
chantant dans la poupe, L'Asie à
un endroit, l'Europe à l'autre, Et à son
front, là-bas, Istanbul. Navigue
mon voilier Sans
craindre, ni navire ennemi Sans
tourment, orage, ni calme Tu te
diriges vers ton cap, Sans
jamais soumettre ta valeur. Vingt
prises avons-nous faites Aux
dépens des Anglais Et ont
baissé leurs bannières Cent
nations à mes pieds. Qu'est-ce
mon bateau, mon trésor Qui est
mon dieu, la liberté Mes
lois, la force et le vent Mon
unique patrie, la mer. Au loin
se bougent de féroces guerres Rois
aveugles, pour un empan de terre. Ici j'ai
à moi Combien
la mer sauvage accapare Celui
qui s'est fait imposer ses lois. Et sur
aucune plage Pas de
splendide bannière Qui ne prévoit
de mon droit De ma
valeur et de mon cœur. Qu'est-ce
mon bateau, mon trésor Qui est
mon dieu, la liberté Mes
lois, la force et le vent Mon
unique patrie, la mer. Ë l'appel « Navire
en vue ! » Regarde
comment il fuit et s'échappe ; Je suis
le roi de la mer Et de ma
furie naît la peur. Mon
butin ƒquitablement
Je le
partage Je ne
désire pour seule richesse Que la
beauté Sans
rival. Qu'est-ce
mon bateau, mon trésor Qui est
mon dieu, la liberté Mes
lois, la force et le vent Mon
unique patrie, la mer. Ma
sentence est la mort ! Oh je ris
Et ne me
résigne pas au sort Même si
on me condamne Pendu à
une quelconque poutre Ë bord
de mon propre bateau. Et si je
meurs Qu'est-ce
la vie ? En
perdant Je
l'avais déjà donnée Sous le
joug de l'esclavage Comme un
brave, Je me
suis retiré. Qu'est-ce
mon bateau, mon trésor Qui est
mon dieu, la liberté Mes
lois, la force et le vent Mon
unique patrie, la mer Ma
musique préférée Sont les
hurlements Les
fracas et le tremblement Des
câbles secoués Les
mugissements de la mer noire Les
rugissements de mes canons. Et du
tonnerre à caractère violent, et du vent la
marée, je m'endors
calme, bercé par la
mer. Qu'est-ce
mon bateau, mon trésor Qui est
mon dieu, la liberté Mes
lois, la force et le vent Mon
unique patrie, la mer. Traduit de l'espagnol en français par Diana Rodriguez Soto L'infinitoSempre caro mi fu quest'ermo colle, E questa siepe, che da tanta parte dell'ultimo orizzonte
il guardo esclude. Ma sedendo e
mirando, interminati spazi di là da quella,
e sovrumani silenzi, e profondissi ma
qu•ete io nel pensier mi
fingo, ove per poco il cor non si
spaura. E come il vento odostor mir tra queste
piante, io quello infinito silenzio a questa
voce vo comparando: e mi
sovvien l'eterno, e le norte
stagioni, e la presente e viva, e il suon
di lei. Cos“ tra questa immensità s'annega il
pensier mio: e il naufragar m'è
dolce in questo mare. GIACOMO
LEOPARDI L'InfiniToujours
chère me fut cette colline solitaire, et cette haie qui
cache au regard un tel horizon. Mais
je m'assieds, je laisse aller mes yeux, et je
contemple des espaces infinis au-delà d'elle, des
silences surhumains aussi, et une
quiétude très profonde et peu
s'en faut que le cœur ne s'effraye. Et comme alors j'entends le vent bruire dans ces
feuilles, je compare ce
silence infini à cette voix, et me
souviens de l'éternel: et des
mortes saisons, et
celle-ci, vivante encore, est pleine de rumeur. Dans
cette immensité en
laquelle s'abîme ma pensée: doux
m'est le naufrage en cette mer. Traduit de l'italien en français par : Mattia Bergamini, Elise Desprez-Pochon et Françoise Sérandour Soneto da fidelidadeDe tudo, meu amor serei atento Quero vivê-lo em cada vão momento E assim, quando mais tarde me procure Eu possa me dizer do amor (que tive): VINICIUS DE MORAES Sonnet de la fidélitéDe tout, mon amour je serai diligent Je veux le vivre pendant chaque moment futile Et ainsi, quand plus tard tu me chercheras Je pourrai me dire de l'amour (que j'ai
eu) : Traduit
du portugais en français par Angela De Bortoli Saggin et Deborah Machado Ayres Me tiraste un limónMe tiraste un limón, y tan amargo, con una mano cálida, y tan pura, que no menoscabó su arquitectura y probé su amargura sin embargo. Con el golpe amarillo, de un letargo dulce pasó a una ansiosa calentura mi sangre, que sintió la mordedura de una punta de seno duro y largo. Pero al mirarte y verte la sonrisa que te produjo el limonado hecho, a mi voraz malicia tan ajena, se me durmió la sangre en la camisa, y se volvió el poroso y áureo pecho una picuda y deslumbrante pena. MIGUEL HERNANDEZ Tu me jetas un citronTu
me jetas un citron très amer de ta
main chaude et si pure, qu'il ne
modifia pas sa matière et je pus
en goûter son amertume cependant. Avec
ce rayon jaune, mon sang est passé
d'une douce léthargie à
une fièvre anxieuse, ressentant la
morsure du
bout d'un sein dur et long. Mais
à force de te regarder et de voir ton sourire provoqué par
un citron ainsi jeté, et te
moquant de ma candeur, mon
sang sous ma chemise s'est endormi, ma
poitrine dorée et poreuse est devenue une
très aiguë et éblouissante peine. Traduit de l'espagnol en français par Alberto Gutierrez Barreno ToboganesTranscurro
en calles que Antes
eran calles. Sucedo
en plazas que Antes
eran infancia. Desciendo,
peldaño a peldaño, Por
escaleras que antes Eran
toboganes.
Y al
caer me descubro Solo
en medio de la nada. Nada
que para otros es todo. Nada
queda ya de aquello… Y
aquello, que era todo, Ahora
es la nada. Y las
dudas. ÁNGEL RUIZ DEL ÁRBOL ToboggansJe
me coule dans les rues qui Avant
étaient des rues. Je
succède sur les places qui Avant
étaient l'enfance. Je
descends, degré par degré, Par
des escaliers qui avant ƒtaient
des toboggans. Et
à la chute, je me découvre Seul
au milieu de rien. Rien
qui pour les autres est tout. Rien
ne reste déjà de cela… Et
cela, qui était tout, Maintenant
n'est rien. Et
les doutes. Traduit de l'espagnol en français par Estefania Guijarro Alcarria Tu, violín¿Quieres ser esta noche mi dulce amigo? Haz vibrar las cuerdas, por mi deseo No busco
matar mi aburrimiento Tú
sabrás expresar el propósito
de mi vida. Una mano invisible te apretaría Sobre un hombro, tú estarías bien Tú serías el amigo que yo tanto he buscado El arco dirigido por un gran músico Indicaría que tengo miedo de mi destino Sin embargo tu sinfonía me haría bien Tendré el coraje de creer en el mañana. El corazón del violinista sería igual a mi corazón Finalmente voy a encontrar mi parte de felicidad Cada nota tocada borrararía mis llantos Y mis ojos retomarían su color. Yo sueño solo contigo mi amigo el violín Habrías podido llevarme hasta el horizonte Puede ser para vivir una nueva etapa Remplazando mis pobres lamentos. ALEXANDRE CREPET, poète du XXIe siècle Toi, le violonVeux-tu
être ce soir mon doux ami ? Fais
vibrer tes cordes, pour mon envie Je ne
cherche pas à tuer mon ennui Tu
saurais exprimer le but de ma vie. Une main
invisible te tiendrait serrée Contre
une épaule, tu serais bien calé Tu serais
l'ami que j'ai tant cherché L'archet
dirigé par un grand musicien Indiquerait
que j'ai peur de mon destin Mais ta
symphonie me ferait du bien J'aurais
le courage de croire en demain. Le cœur
du violoniste égalerait mon cœur Je
retrouverai enfin ma part de bonheur Chaque
note jouée effacerait mes pleurs Et mes
yeux reprendraient leur couleur. Je rêve
seule de toi, mon ami le violon Tu aurais
pu m'emporter vers l'horizon Peut-être
pour vivre une nouvelle saison Remplaçant
ainsi mes pauvres lamentations. Traduction Valentina Acu Poderoso caballero es Don DineroMadre, yo al oro me humillo, Más
valen en cualquier tierra
FRANCISCO DE QUEVEDO Y VILLEGAS (s. XVII)
Mère, moi je m'humilie à l'or, Il est mon amoureux et aimé, Puisque de pur amoureux, Il est constamment jaune. Puisque doublon ou petite monnaie, Il fait tout ce que je veux, Puissant galant Est Monsieur Argent. Il naît honnête aux Indes, Où le monde l'accompagne ; Il vient à mourir en Espagne, Et est enterré à Gênes. Puisque pour qui l'amène à
coté Il est beau, même si féroce, Puissant galant Est Monsieur Argent. Ses parents sont des chefs, Et Il est issu des nobles, Parce que dans les veines d'Orient Tous les sangs sont royaux. Puisqu'il rend égaux Riche et Mendiant, Puissant galant Est Monsieur Argent. Qui n'est pas émerveillé De voir aux anges, sans taxation, Qui est le plus vil de sa maison, Ë Madame Blanche de Castille ? Puisque sa force humilie Le lâche et le brave, Puissant galant Est Monsieur Argent.
C'est tellement sa majesté, Bien que ses deuils soient fatigués, Que même s'il est fait sou, Il ne perd pas sa qualité. Car il donne l'autorité Au fainéant et au journalier, Puissant galant Est Monsieur Argent.
Plus
vaut dans quelque pays, (Regard
s'il est assez sagace) Ses écus
pendant la paix Que les
rondaches en guerre. Puisqu'il
exile le natif Et
accueilli à l'étranger, Puissant
galant Est
Monsieur Argent. Traduit de l'espagnol en français par Alvaro Vigueras Vilchez |
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